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faible partie de l’espèce humaine qu’il soit iuutile de nous faire présenter lorsque nos intérêts sont en cause ? Mais en attendant que nous formions tontes une sainte alliance, et que nous nous donnions la main, revenons à nos dames du nouveau monde : le temps marche, que font-elles ? Elles rusent, elles minent sourdement un édifice où, sans place, sans puissance, on ne les juge encore propres qu’à concourir à la reproduction de leur espèce. Aussi, plus j’avance plus je prévois la fin d’un pénible rêve.

Non, non, monsieur le législateur, ce ne sont pas seulement vos doctrinaires qui ont renversé votre monde, mais cet injurieux dédain pour les femmes, mais l’absence de système, de principe, qui pût à la fois satisfaire tous et chacun.

Oh ! si dans ce grand bouleversement de la nature, M. de Brémont avait jugé à propos de ne tendre la main, à moi chétive enfant du peuple, oui, je le sens, pour le remercier de m’admettre à partager la gloire de cette grande œuvre je me serais avancée vers lui hardiment et lui aurais dit : vous vous imposez la sublime tâche de faire un monde nouveau, croyez-moi, ce ne sera qu’une vaine prétention si de prime abord vous ne déclarez pas la femme votre égale. Vous le devez si vous souhaitez être conseillé, secondé, aimé ! aimé dignement. D’ailleurs, n’est-il pas juste que puisque notre bannière est à la peine elle soit aussi à l’honneur. Et de ce principe découleront naturellement toutes ces conséquences : réglemens sociaux faits dans l’intérêt des deux sexes, éducation publique donnée aux enfans d’après une seule méthode, par des femmes et par des hommes, les cérémonies, les assemblées présidées également par des femmes et des hommes, enfin association réelle dans les unions et non plus accouplemens. Et comme entre gens d’esprit on s’entend vite, M. de Bremont, frappé aussi de l’impossibilité de rien faire de nouveau sans nous aurait consenti sans aucun doute à partager sa puissance pour avoir en retour le bonheur. Je me serais alors adressée à mes compa-