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cette question ne n’accuseront pas de penser encore à leur forger de nouvelles chaînes, certes j’ai prouvé combien la liberté m’est chère, combien elle est nécessaire à ma vie.

Je veux pour mon sexe le plus de liberté possible, toute la liberté qui se pourra concilier avec l’influence active moralisante qu’il est appelé à exercer dans la société future ; enfin je veux son complet affranchissement. Mais, dans la vie, il n’y a pas que des droits à acquérir, il y a aussi des devoirs à observer ; donc, pour être progressive, il faut harmoniser sans cesse les deux termes de l’épigraphe que j’ai placé en tête de cette feuille :

« Égalité entre tous de droits et de devoirs.

Les femmes qui n’envisageront dans cette proposition que la face devoirs, feront de l’abnégation, resteront chrétienne ; c’est ce qui existe, c’est la morale approuvée, tirée des religions du passé dans lesquelles il n’y avait pas de place pour nos droits ; les femmes au contraire qui ne demanderaient à la société que des droits, ne feraient que de l’indépendance, du républicanisme, et non de la religion ; c’est-là le protestantisme, la partie critique de la morale reçue.

Pour moi qui sens la femme liée à tout comme fille, femme et mère dans la famille, citoyenne dans l’état, élue de Dieu dans le temple, et parcelle de l’infini dans le monde ! je veux pour elle place partout, une place reconnue, mais réglée, assez large, assez spacieuse pour qu’elle s’y trouve à l’aise, assez belle, assez honorée pour qu’elle s’y complaise.

Que le monde se rassure donc ; avec le sentiment bien compris de nos droits et de nos devoirs, nous nous montrerons grandes et fortes, nous introduirons sans crainte dans la morale du passé le génie de la destruction, et nous saurons d’une main ferme lui tracer une limite. Oui, je le dis hautement, ce n’est pas dans les résultats du vice que je vois la plus grande immoralité, mais bien dans la cause qui le