Page:La Femme libre, 1832.pdf/24

Cette page a été validée par deux contributeurs.
5

fusent les moyens qu’on leur offre de moraliser l’immoralité elle-même, qui déclarent cette moralisation impraticable ; que dis-je ! qui la font envisager, non comme un remède, mais comme un poison violent. Qu’ils jettent donc un regard observateur sur le passé, sur le présent, fruit de leurs vastes conceptions en politique, en morale, et sur l’avenir qu’ils se préparent, en suivant la même route. Est-il tellement beau, ce passé, ce présent, cet avenir, qu’ils aient beaucoup à s’en glorifier. Qu’ils considèrent l’impuissance, le vice même du mode de moralisation qu’ils ont employé jusqu’à présent, en en voyant les funestes effets ; et je ne puis trop le dire, ces funestes effets c’est l’adultère, c’est la prostitution. Que faut-il donc que le mal ait de plus terrible pour qu’ils consentent au remède ? Que leur faut-il de plus que les souillures et les douleurs innombrables de la chair, pour leur faire voir qu’elle ne peut, qu’elle ne doit pas être soumise à l’esprit, mais bien marcher son égale. Qu’attendent-ils donc pour être convaincus que des élémens de progrès, des principes de moralisation, plus puissans que ce qu’ils ont imaginé dans leur morale toute spirituelle, sont renfermés dans ces vices sur lesquels ils ne savent que jeter anathème. Ce qu’ils attendent sans doute, c’est que la femme s’unisse à l’homme pour formuler la loi nouvelle. C’est qu’elle quitte l’aiguille et la navette pour endosser la robe de l’apostolat ; c’est qu’elle vienne, elle que l’homme ne pourra repousser, leur dire et ce qu’il y a d’impuissant dans leur morale pour le bonheur du monde, et tout ce qu’il y a à espérer de paix, d’ordre, de bonheur, dans ce qu’elle veut pour l’avenir. Nous en avons la foi : quand la femme aura parlé, on ne condamnera plus, on ne s’effraiera plus, parce qu’il appartient à la femme, de concert avec l’homme, d’apporter au monde paix, ordre et bonheur.

Joséphine-Félicité.