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on y a successivement répondu d’un bout de l’Europe à l’autre, et chaque homme a senti un saint frémissement à l’aspect des vérités où sa nature l’appelait.

Quand, plus de mille ans après, on a proclamé de même l’affranchissement de la femme, d’où vient que peu de gens se sont émus ? C’est que le christianisme était sage, qu’il ne dépassait pas d’éternelles lois, qu’il rendait morale des Hébreux plus indulgente et plus douce, sans la renverser de fond en comble, et que Jésus-Christ disait : « Ne croyez pas que je sois venu anéantir la loi ou les prophètes ; je ne suis pas venu les anéantir, mais les accomplir. »

Qu’a fait le saint-simonisme ? Il est venu proclamer l’affranchissement de la femme au milieu d’idées si immorales et si absurdes, que le premier devoir d’une femme qui veut écrire dans ce journal est de protester pour l’affranchissement, séparé de toutes les théories d’essai que le Globe y avait associées.

Les femmes faibles et tranquilles, qui se complaisent dans l’obscurité, ont pu, à l’appel des saint-simoniens, ne pas sortir de leur repos ; mais celles que leur sexe seul retient dans l’oisiveté, qui ont l’esprit, le courage et l’audace, qui voient avec envie, dans la jeunesse, leurs frères se rendre aux écoles publiques ; qui pleurent de ce que l’émulation, les cours, les sciences, les grandes lumières leur sont ravies ; celles qui voudraient les périls, les combats, l’éloquence ; qui suivent d’un œil attristé la longue carrière des hommes, voyant parvenir et briller, sans les suivre, leurs amis et leurs amans ; celles-là ont accueilli le saint-sinmonisme avec le respect qui a suivi toutes les lois d’affranchissement. Ces femmes n’avaient dès lors qu’à proclamer leur sympathie pour la foi nouvelle, lui donnant tout l’appui qui était en leur pouvoir ; mais cette religion les a intimidées, non, comme on l’a cru, parce