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vront avant tout, faire à leur sexe le sacrifice de leur réputation. Les possesseurs de femmes ne sont-ils pas par cela même, tous disposés à continuer les mille calomnies qui ont été débitées sur la société Saint-Simonienne. N’a-t-on pas dit qu’en politique nous voulions établir la loi agraire ; en entendant les femmes parler de liberté, ne dira-t-on pas que nous demandons l’avilissant pêle-mêle. Oh ! non, ce ne serait pas en détruisant ce qu’il y a de plus précieux dans la liberté, et de plus délicat dans l’amour, que nous justifierions la prétention d’être les femmes et les hommes les plus moraux et les plus religieux de notre temps.

Que ces hommes se rassurent donc ; l’esclave seule, ruse, trompe, et proteste par le désordre.

Que de gens ne cessent de nous dire qu’il n’y a pas de pays où les femmes soient plus libres qu’en celui-ci, cela est vrai, la belle et progressive France sera toujours à la tête de l’humanité ; mais nos droits en sont-ils plus reconnus ? et n’est-ce pas à nos caresses souvent trompeuses ; à notre souplesse, enfin à ces mille petites ruses que nous devons la position où nous nous trouvons.

N’entendons-nous pas encore dans le mariage civil le mot de protection. Oh ! si tous les hommes n’estimant pas la force au-dessus de tout, nous respectaient dans nos personnes et dans nos volontés, ce mot de protection ne devrait-il pas être remplacé par le mot égalité, et dans les mariages chrétiens, cette phrase de droit divin : Femmes soyez soumises à vos maris, n’est-elle pas encore plus surannée. Que dans un temps de barbarie et de servitude, les prêtres chrétiens adorateurs d’un Dieu pur esprit, nous aient imposé cette loi, je le conçois, la puissance force étant et justifiant tout, c’était alors nous protéger, que d’établir ce droit de propriété sur nous. Après avoir passé par les religions du paganisme où nous étions généralement considérées comme des instrumens de plaisir, c’était reprendre un peu de dignité que d’être unie à un seul homme par l’indissoluble mariage chrétien, par ce titre d’épouse légitime, de mère de famille.

Mais ce qui était tolérable alors, l’est-il encore aujourd’hui ?… Quel aveuglement de croire que l’humanité doit