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cru se sont trompés, répondit madame la dauphine, et je vais vous conter son histoire en peu de mots :

Elle était d’une bonne maison d’Angleterre. Henri VIII avait été amoureux de sa sœur et de sa mère, et l’on a même soupçonné qu’elle était sa fille. Elle vint ici avec la sœur de Henri VII, qui épousa le roi Louis XII. Cette princesse, qui était jeune et galante, eut beaucoup de peine à quitter la cour de France après la mort de son mari ; mais Anne de Boulen, qui avait les mêmes inclinations que sa maîtresse, ne se put résoudre à en partir. Le feu roi en était amoureux, et elle demeura fille d’honneur de la reine Claude. Cette reine mourut, et madame Marguerite, sœur du roi, duchesse d’Alençon, et depuis reine de Navarre, dont vous avez vu les contes, la prit auprès d’elle, et elle prit auprès de cette princesse les teintures de la religion nouvelle. Elle retourna ensuite en Angleterre et y charma tout le monde ; elle avait les manières de France qui plaisent à toutes les nations ; elle chantait bien, elle dansait admirablement : on la mit fille de la reine Catherine d’Arragon, et le roi Henri VIII en devint éperdument amoureux.

Le cardinal de Volsey, son favori et son premier ministre, avait prétendu au pontificat ; et, mal satisfait de l’empereur, qui ne l’avait pas soutenu dans cette prétention, il résolut de s’en venger et d’unir le roi son maître à la France. Il mit dans l’esprit de Henri VIII que son mariage avec la tante de l’Empereur était nul, et lui proposa d’épouser la duchesse d’Alençon, dont le mari venait de mourir. Anne de Boulen, qui avait de l’ambition, regarda ce divorce comme un chemin