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d’Espagne fait de si grandes instances pour épouser cette reine. Ce ne serait peut-être pas un rival bien redoutable dans une galanterie ; mais je pense que dans un mariage votre majesté ne me conseillerait pas de lui disputer quelque chose. Je vous le conseillerais en cette occasion, reprit le roi : mais vous n’aurez rien à lui disputer ; je sais qu’il a d’autres pensées ; et, quand il n’en aurait pas, la reine Marie s’est trop mal trouvée du joug de l’Espagne, pour croire que sa sœur le veuille reprendre, et qu’elle se laisse éblouir à l’éclat de tant de couronnes jointes ensemble. Si elle ne s’en laisse pas éblouir, repartit M. de Nemours, il y a apparence qu’elle voudra se rendre heureuse par l’amour. Elle a aimé le milord Courtenay, il y a déja quelques années : il était aussi aimé de la reine Marie, qui l’aurait épousé du consentement de toute l’Angleterre, sans qu’elle connût que la jeunesse et la beauté de sa sœur Élisabeth le touchaient davantage que l’espérance de régner. Votre majesté sait que les violentes jalousies qu’elle en eut la portèrent à les mettre l’un et l’autre en prison, à exiler ensuite le milord Courtenay, et la déterminèrent enfin à épouser le roi d’Espagne. Je crois qu’Élisabeth, qui est présentement sur le trône, rappellera bientôt ce milord, et qu’elle choisira un homme qu’elle a aimé, qui est fort aimable, qui a tant souffert pour elle, plutôt qu’un autre qu’elle n’a jamais vu. Je serais de votre avis, repartit le roi, si Courtenay vivait encore ; mais j’ai su, depuis quelques jours, qu’il est mort à Padoue, où il était relégué. Je vois bien, ajouta-t-il en quittant M. de Nemours, qu’il faudrait faire votre mariage comme on ferait celui de M. le dauphin, et