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pressa de lui faire connaître quels étaient les sentiments qu’elle avait pour lui, et il lui dit que ceux qu’il avait pour elle étaient d’une nature qui le rendraient éternellement malheureux si elle n’obéissait que par devoir aux volontés de madame sa mère.

Comme mademoiselle de Chartres avait le cœur très-noble et très-bien fait, elle fut véritablement touchée de reconnaissance du procédé du prince de Clèves. Cette reconnaissance donna à ses réponses et à ses paroles un certain air de douceur qui suffisait pour donner de l’espérance à un homme aussi éperdument amoureux que l’était ce prince ; de sorte qu’il se flatta d’une partie de ce qu’il souhaitait.

Elle rendit compte à sa mère de cette conversation ; et madame de Chartres lui dit qu’il y avait tant de grandeur et de bonnes qualités dans M. de Clèves, et qu’il faisait paraître tant de sagesse pour son âge, que, si elle sentait son inclination portée à l’épouser, elle y consentirait avec joie. Mademoiselle de Chartres répondit qu’elle lui remarquait les mêmes bonnes qualités, qu’elle l’épouserait même avec moins de répugnance qu’un autre, mais qu’elle n’avait aucune inclination particulière pour sa personne.

Dès le lendemain, ce prince fit parler à madame de Chartres. Elle reçut la proposition qu’on lui faisait, et elle ne craignit point de donner à sa fille un mari qu’elle ne pût aimer, en lui donnant le prince de Clèves. Les articles furent conclus : on parla au roi, et ce mariage fut su de tout le monde.

M. de Clèves se trouvait heureux, sans être néanmoins entièrement content : il voyait avec beaucoup de