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à sa vertu, et qu’elle ne pouvait voir son amant qu’en le faisant entrer la nuit chez elle, à l’insu de son mari, elle se trouva dans une extrémité épouvantable. Le comte de Chabanes attendait sa réponse comme une chose qui allait décider de sa vie ou de sa mort. Jugeant de l’incertitude de la princesse par son silence, il prit la parole pour lui représenter tous les périls où elle s’exposerait par cette entrevue ; et, voulant lui faire voir qu’il ne lui tenait pas ce discours pour ses intérêts, il lui dit : Si, après tout ce que je viens de vous représenter, madame, votre passion est la plus forte, et que vous désiriez voir le duc de Guise, que ma considération ne vous en empêche point, si celle de votre intérêt ne le fait pas. Je ne veux point priver d’une si grande satisfaction une personne que j’adore, ni être cause qu’elle cherche des personnes moins fidèles que moi pour se la procurer. Oui, madame, si vous le voulez, j’irai quérir le duc de Guise dès ce soir, car il est trop périlleux de le laisser plus long-temps où il est, et je l’amènerai dans votre appartement. Mais par où et comment, interrompit la princesse ? Ah ! madame, s’écria le comte, c’en est fait, puisque vous ne délibérez plus que sur les moyens. Il viendra, madame, ce bienheureux amant. Je l’amènerai par le parc : donnez ordre seulement à celle de vos femmes à qui vous vous fiez le plus, qu’elle baisse, précisément à minuit, le petit pont-levis, qui donne de votre antichambre dans le parterre, et ne vous inquiétez pas du reste. En achevant ces paroles, il se leva ; et, sans attendre d’autre consentement de la princesse de Montpensier, il remonta à cheval, et vint trouver le duc de Guise, qui l’attendait avec une impatience extrême.