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les passions : elle se trouva dans une sorte de calme de se croire assurée de mourir, et de voir sa réputation en sûreté ; elle ne songea plus qu’à se préparer à la mort ; et, comme c’était une personne dont tous les sentiments étaient vifs, elle embrassa la vertu et la pénitence avec la même ardeur qu’elle avait suivi sa passion. Son âme était d’ailleurs détrompée, et noyée dans l’affliction : elle ne pouvait arrêter les yeux sur aucune chose de cette vie, qui ne lui fût plus rude que la mort même ; de sorte qu’elle ne voyait de remède à ses malheurs que par la fin de sa malheureuse vie. Elle passa quelque temps en cet état, paraissant plutôt une personne morte qu’une personne vivante : enfin, vers le sixième mois de sa grossesse, son corps succomba ; la fièvre continue lui prit, et elle accoucha par la violence de son mal ; elle eut la consolation de voir son enfant en vie, d’être assurée qu’il ne pouvait vivre, et qu’elle ne donnait pas un héritier illégitime à son mari ; elle expira elle-même peu de jours après, et reçut la mort avec une joie que personne n’a jamais ressentie : elle chargea son confesseur d’aller porter à son mari la nouvelle de sa mort, de lui demander pardon de sa part, et de le supplier d’oublier sa mémoire, qui ne pouvait lui être qu’odieuse.

Le comte de Tende reçut cette nouvelle sans inhumanité, et même avec quelques sentiments de pitié ; mais néanmoins avec joie. Quoiqu’il fût fort jeune, il ne voulut jamais se remarier, et il a vécu jusqu’à un âge fort avancé.



fin de la comtesse de tende.