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un moyen, en lui donnant la conduite de madame Élisabeth, et l’obligea même à partir devant cette princesse ; et ainsi il ne demeura personne à la cour qui pût balancer le pouvoir de la maison de Guise.

Quoique ce fût une chose fâcheuse pour M. de Clèves de ne pas conduire madame Élisabeth, néanmoins il ne put s’en plaindre, par la grandeur de celui qu’on lui préférait ; mais il regrettait moins cet emploi par l’honneur qu’il en eût reçu, que parce que c’était une chose qui éloignait sa femme de la cour, sans qu’il parût qu’il eût dessein de l’en éloigner.

Peu de jours après la mort du roi, on résolut d’aller à Rheims pour le sacre. Sitôt qu’on parla de ce voyage, madame de Clèves, qui avait toujours demeuré chez elle, feignant d’être malade, pria son mari de trouver bon qu’elle ne suivît point la cour, et qu’elle s’en allât à Coulommiers prendre l’air et songer à sa santé. Il lui répondit qu’il ne voulait point pénétrer si c’était la raison de sa santé qui l’obligeait à ne pas faire le voyage, mais qu’il consentait qu’elle ne le fît point. Il n’eut pas de peine à consentir à une chose qu’il avait déjà résolue. Quelque bonne opinion qu’il eût de la vertu de sa femme, il voyait bien que la prudence ne voulait pas qu’il l’exposât plus long-temps à la vue d’un homme qu’elle aimait.

M. de Nemours sut bientôt que madame de Clèves ne devait pas suivre la cour : il ne put se résoudre à partir sans la voir ; et, la veille du départ, il alla chez elle aussi tard que la bienséance le pouvait permettre, afin de la trouver seule. La fortune favorisa son intention. Comme il entra dans la cour, il trouva madame