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sorte de douleur. Le roi s'en retourna à Léon et il restait si peu de choses à faire pour l'entière exécution de la paix, que, selon les apparences, Zuléma devait bientôt repasser en Afrique. Il n'était pas néanmoins en état de partir ; il avait été dangereusement malade dans le même temps que Félime était morte, et l'on avait caché à Zayde l'extrémité de sa maladie pour ne l'accabler pas de tant de déplaisirs à la fois. Consalve était dans des inquiétudes mortelles et ne songeait qu'aux moyens de faire consentir ce prince à son bonheur ou d'obtenir de Zayde de demeurer en Espagne auprès de la reine, puisque la bienséance lui permettait de ne pas suivre un père qui paraissait résolu à la faire changer de religion. Quelques jours après qu'on fut arrivé à Léon, Consalve entra un soir dans le cabinet de la reine ; Zayde y était, mais si attachée à regarder un portrait de Consalve, qu'elle ne le vit point entrer.

— Je suis bien destiné, madame, lui dit-il, à être jaloux d'un portrait, puisque je le suis même du mien et que j'envie l'attention que vous avez à le regarder.

— De votre portrait ? répondit Zayde avec un étonnement extrême :

— Oui, madame, de mon portrait, reprit Consalve. Je vois bien que vous avez peine à le croire par sa beauté, mais je vous assure néanmoins qu'il a été fait pour moi.

— Consalve, lui dit-elle, n'a-t-on point fait pour vous quelque autre portrait semblable à celui que je vois ?

— Ah ! madame, s'écria-t-il avec ce trouble que donnent les joies incertaines, puis-je croire ce que vous me laissez deviner et ce que je n'ose même vous dire ? Oui, madame, continua-t-il, d'autres portraits, pareils à celui que vous voyez, ont été faits