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pas aisément l'impression qu'il a faite en votre coeur. Je vois en vous les mêmes choses que j'ai senties lorsque j'ai commencé à aimer Alamir et plût au ciel que j'eusse en lui les mêmes choses que vous voyez en Théodoric !

— Vous vous trompez, dit Zayde, lorsque vous croyez qu'il a de l'inclination pour moi, il en a sans doute pour quelque autre, et la tristesse que je lui vois vient d'une passion dont je ne suis pas la cause. J'ai au moins la consolation, dans mon malheur, que l'impossibilité de lui parler m'empêche d'avoir la faiblesse de lui dire que je l'aime.

Peu de temps après cette conversation, Zayde vit de loin Théodoric qui regardait avec attention quelque chose qu'il tenait entre ses mains. La jalousie lui fit imaginer que c'était un portrait ; elle résolut de s'en éclaircir et s'approcha de lui le plus doucement qu'il lui fut possible. Ce ne put être avec si peu de bruit qu'il ne l'entendît. Il se tourna et cacha ce qu'il tenait, en sorte qu'elle vit seulement briller des pierreries. Elle ne douta plus que ce ne fût une boîte de portrait ; quoiqu'elle l'eût déjà soupçonné, la certitude qu'elle en crut avoir, lui donna tant de douleur qu'elle ne put cacher sa tristesse, ni regarder Théodoric, et elle demeura pénétrée de douleur de sentir une inclination si vive pour un homme qui soupirait pour un[e] autre. Le hasard voulut que Théodoric laissât tomber ce qu'il avait caché, elle vit que c'était me attache de diamants, qui tenait à un bracelet de ses cheveux qu'elle avait perdu quelques jours auparavant. La joie quelle eut de s'être trompée ne lui permit pas de témoigner de la colère, elle prit son bracelet et rendit les pierreries à Théodoric,