Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 1.djvu/297

Cette page n’a pas encore été corrigée

encore tourner notre barque pour voir s'il nous suivrait toujours ; pour moi, j'en étais embarrassée sans en pouvoir dire la cause. Je regardai avec attention celui qui paraissait le maître des autres, et, en le voyant de plus près, je lui trouvai dans le visage quelque chose de si fin et de si agréable que je crus n'avoir jamais vu personne si capable de plaire. Je dis à Zayde qu'il fallait retourner auprès d'Alasinthe et de Bélénie et que, sans doute, lorsqu'elles nous avaient permis de nous promener, elles n'avaient pas cru que nous dussions trouver une pareille aventure. Elle fut de mon avis. Nous fîmes tourner vers la terre ; la barque qui nous suivait passa devant nous et alla débarquer proche des autres chaloupes qui étaient déjà arrivées.

Lorsque nous abordâmes, celui que nous avions remarqué, suivi d'un grand nombre des siens, s'avança pour nous donner la main avec un air qui nous fit juger qu'il avait déjà appris qui nous étions, de ceux qui étaient sur le rivage. Mon étonnement et celui de Zayde étaient extrêmes, nous n'étions pas accoutumées à nous voir aborder avec tant de liberté, et surtout par les Arabes, pour lesquels on nous avait inspiré une grande aversion. Nous crûmes que celui qui nous venait parler, serait bien surpris, lorsqu'il trouverait que nous n'entendions point sa langue, mais nous fûmes bien surprises nous-mêmes de l'entendre parler la nôtre avec toute la politesse de l'ancienne Grèce.

— Je sais, madame, dit-il en, s'adressant à Zayde, qui marchait la première, qu'un Arabe ne devrait pas être assez hardi pour vous approcher sans vous en avoir demandé la permission, mais je crois que ce qui serait