Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 1.djvu/296

Cette page n’a pas encore été corrigée

dans nos humeurs, la mienne penchait moins à la joie ; il était aisé de le connaître en nous voyant, aussi bien que l'avantage que la beauté de Zayde avait sur la mienne.

Peu de temps avant que l'empereur Léon envoyât attaquer l'île de Chypre, nous étions un jour sur le rivage. La mer était tranquille ; nous priâmes Alasinthe et Bélénie de trouver bon que nous entrassions dans des barques pour nous promener. Nous prîmes plusieurs jeunes personnes avec nous, et nous fîmes tourner vers de grands vaisseaux qui étaient à la rade. Comme nous approchâmes de ces vaisseaux, nous en vîmes détacher des chaloupes, et nous jugeâmes que c'étaient des Arabes qui venaient prendre terre. Ces chaloupes venaient vers nous comme nous allions vers elles. Il y avait dans la première plusieurs hommes magnifiquement habillés, et un, entre autres, qui, par son air noble et la beauté de sa taille, se faisait distinguer de tous ceux qui l'environnaient. Cette rencontre nous surprit, nous trouvâmes que nous ne devions pas avancer davantage, et qu'il ne fallait pas donner lieu de croire à ceux qui étaient dans cette chaloupe, que la curiosité de les voir nous eût conduites de leur côté. Nous fîmes tourner notre banque sur la main droite ; la chaloupe que nous voulions éviter, tourna comme nous ; les autres allèrent droit à terre ; celle-là nous suivit et nous approcha assez pour nous faire voir que cet homme que nous avions distingué des autres, était attaché à nous regarder et qu'il était même bien aise de nous faire remarquer qu'il prenait plaisir à nous suivre. Zayde trouva notre aventure agréable, et fit