Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 1.djvu/267

Cette page n’a pas encore été corrigée

un lit de repos. Sa tête était appuyée sur une de ses mains ; de l'autre elle essuyait ses larmes et cachait son visage, comme si elle eût voulu retarder de quelques moments la vue de ses ennemis. Enfin, au bruit que firent ce dont Consalve était suivi, elle se tourna et lui fit reconnaître Zayde, mais Zayde plus belle qu'il ne l'avait jamais vue, malgré la douleur et le trouble qui paraissaient sur son visage. Consalve fut si surpris qu'il parut plus troublé que Zayde, et Zayde sembla se rassurer et perdre une partie de ses craintes à la vue de Consalve. Ils s'avancèrent l'un vers l'autre et, prenant tous deux la parole, Consalve se servit de la langue grecque pour lui demander pardon de paraître donnant elle comme un ennemi, dans le même moment que Zayde lui disait en espagnol qu'elle ne craignait plus les malheurs qu'elle avait appréhendés et que ce ne serait pas le premier péril dont il l'aurait garantie. Ils furent si étonnés de s'entendre parler leurs langues, et leur surprise leur jeta si vivement dans l'esprit les raisons qui les avaient obligés de les apprendre, qu'ils en rougirent et demeurèrent quelque temps dans un profond silence. Enfin, Consalve reprit la parole et, continuant de se servir de la langue grecque : Je ne sais, madame, lui dit-il, si j'ai eu raison de souhaiter, autant que je l'ai fait, que vous me pussiez entendre ; peut-être n'en serai-je pas moins malheureux, mais, quoi qu'il puisse m'arriver, puisque j'ai la joie de vous revoir après en avoir tant de fois perdu l'espérance, je ne me plaindrai plus de ma fortune. Zayde parut embarrassée de ce que lui disait Consalve, et le regardant avec ses beaux yeux où il ne paraissait néanmoins