Page:La Fare - Mémoires de Madame la Comtesse de la Bouquetière de Saint-Mars, 1884.djvu/88

Cette page n’a pas encore été corrigée

se repliait, et les bonnes auberges ne voulaient pas nous recevoir ; les mauvaises même nous donnaient asile pour nous attraper. Je rencontrai en chemin un jeune émigré qui faisait à pied la même route ; je le connaissais et je le chargeai d’aller m’acheter quelques provisions pour me sustenter un peu. Jamais je ne pus me procurer un lit ; on nous étendait de la paille dans une chambre et il fallait nous y coucher pêle-mêle.

Après des fatigues sans nombre, j’arrivai à Ratisbonne, enchantée de quitter ma société économique. Je fus descendre chez la comtesse de Boisgelin, j’étais exténuée de besoin. Elle me fit donner à dîner, et après en avoir profité amplement, je lui fis l’histoire de mon voyage où il y avait du burlesque et du triste. J’appris que les Français n’étaient pas entrés à Francfort, ils avaient été repoussés par les Autrichiens et obligés de repasser le Rhin avec pertes. Le calme renaissait en Allemagne. Mon frère, à qui j’écrivis pour lui faire savoir mon arrivée, m’envoya aussitôt un passeport pour Munich avec un peu d’argent. Mme de Boisgelin, d’une obligeance parfaite, m’avait procuré une chambre honnête, dans un hôtel qu’avait occupé le ministre français, qui était mort il y avait quelque temps. Sa