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absolument tout vendu : boîtes d’or, montres, enfin l’entourage en brillant du portrait de mon mari ; tout cela vendu à bas prix. Je m’étais adressée à mon frère, l’évêque de Nancy, pour avoir quelques secours. Il m’en promettait de très prompts, mais ils n’arrivaient pas. Je commençais à perdre courage. Six personnes à nourrir par jour, quelque mal qu’on pouvait les faire vivre, il en coûtait beaucoup ; d’autant que le pays était épuisé par le passage de la résidence des troupes. C’était dans l’hiver de 94 à 95 qui fut très rigoureux. Cet argent m’arriva enfin par la diligence. Mme de Choiseul, qui ne me voyait plus venir chez elle, envoya savoir de mes nouvelles. Je lui fis dire que j’allais mieux et que je la verrais dans le jour. Je n’y manquai pas. Elle me demanda ce que j’avais eu pour me faire rester si longtemps sans sortir. « Ah ! lui dis-je, Madame, ma bourse était plus malade que moi. Elle était totalement épuisée et le désespoir commençait à me gagner. – Votre confidence m’engage à vous faire la mienne. Comme vous, Madame, je viens d’éprouver la même détresse. J’avais envoyé depuis quelque temps une garniture de dentelle à Aschaffenbourg pour la vendre. On m’en offrait bien peu, quoique très belle. Je ne pouvais me décider à la donner à un