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Elle était rendue à quatre lieues de Châlons ; la terreur s’était répandue sur toute la route jusques à Paris ; les révolutionnaires se croyaient perdus. Les meneurs de l’Assemblée parvinrent à tout arrêter, et cette belle armée, affaiblie par la dysenterie, revint à Trèves sans avoir brûlé une amorce. Nous vîmes arriver plusieurs gentilshommes ; ils étaient si changés qu’il nous était impossible de reconnaître les mêmes hommes que nous avions vu partir, il y avait six semaines, pleins de santé, de courage et d’espérance. Que ne peut produire, au physique comme au moral, un tel malheur ! Nous allions presque tous les jours nous promener en voiture sur la grande route, pour aller à la rencontre de son fils, de son beau-frère, le baron de Bartillat et de mon mari. Un jour nous nous entretenions sur notre sort futur, et l’une et l’autre nous prévoyions que notre cause était perdue. « Avez-vous encore un peu d’argent ? – Oui, me dit-elle. – Et moi aussi ; réunissons nos fonds et montons un commerce. » Cette idée lui plut, mais elle en resta là. L’arrivée de son fils, de son beau-frère, celle de mon mari me forcèrent à chercher un logement.

Mon mari revint malade, exténué par la fatigue. Il eut cependant le bonheur de revenir à cheval.