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officier qui ne savait pas un mot de français. Ma femme de chambre était heureusement allemande ; elle répétait fidèlement ce que je lui disais, et elle y mit tant de pathétique que l’officier en fut attendri et nous laissa partir. Cela prit beaucoup de temps, et je n’arrivai à Trèves qu’à minuit, mourant de faim et de fatigue. Mon mari m’attendait chez ma jeune amie, Mme Du Montet. C’est chez elle où je fus descendre, ne connaissant pas le logement qu’on avait arrêté. Mon mari me croyait perdue et il se trouva bien heureux en me voyant. Pour lui, il était arrivé de très bonne heure, ayant évité le camp prussien, et il ne pouvait prévoir ce qui nous avait fait rester si longtemps en route. La ville était pleine de l’armée des Princes, tant infanterie que cavalerie. Le roi de Prusse vint la passer en revue, accompagné de Mgr le comte d’Artois. Je fus voir cette revue dans la voiture de la marquise de Bartillat. J’eus le bonheur de voir notre prince. L’espérance du succès brillait dans ses yeux, et chaque combattant se livrait à ce doux présage. D’après ce que l’on me dit et qu’on regardait comme certain, la noblesse était au nombre de 20,000 hommes, toute armée et montée à ses propres frais. Plusieurs d’entre eux, cadets de famille, avaient vendu leur métairie