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curé vint nous y voir. On nous servit à souper qui ne fut pas fort en mets et cependant assez cher. Nous devions partir à deux heures pour passer de bonne heure dans un endroit où il y avait des troupes. Le curé nous fit une longue exhortation. Tout avait l’air du mystère dans cette maison ; il n’y eut que le curé qui parla. Il nous demanda ce que nous avions d’argent. Je ne voulais pas le dire ; il me dit alors : « Accusez juste, Madame. – Eh, qu’est-ce que cela peut vous faire, Monsieur le Curé ? – Si on vous volait, Madame, la somme vous serait rendue. – Et par qui ? » Je vis alors que c’était le gouvernement qui favorisait notre rentrée et voulait savoir le numéraire que cette mesure faisait revenir en France. On nous indiqua l’auberge à Strasbourg où il fallait descendre ; il était clair que tout était concerté. Je dis à l’homme qui nous conduisait de nous faire entrer par la porte de Paris ; il nous dit qu’oui, mais il n’en fit rien. À la porte de la ville, la sentinelle arrêta la voiture et nous demanda nos passeports. Après les avoir lus, il dit en riant : « Toujours du même département, cela est singulier. » J’eus peur de la remarque et je tirais de ma poche un écu de six francs pour le lui glisser dans la main ; il ne m’en laissa pas le temps et cria : « Allons, cocher,