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taux et leur activité à d’autres développements plus efficaces. Cet état des affaires fut transformé par les demandes de transports américains durant la guerre. Mais à présent que les Etats-Unis portent leur attention directement sur la navigation Trans-Pacifique, la presse japonaise et l’opinion publique s’élèvent avec « indignation » et s’alarment à un tel point que la Diète Japonaise se trouve très embarrassée pour pouvoir répondre à toutes les interpellations sur ce sujet. En un mot, le Japon veut garder sa position et continuer à détenir entre ses mains la navigation Trans-Pacifique.

La question est de savoir si cela fera l’affaire des Etats-Unis, vu le développement rapide de leurs relations commerciales dans le Pacifique. Si les marchands américains pouvaient dépendre des moyens de transport Japonais comme ils l’ont fait des lignes Européennes de l’Atlantique, ce serait tout différent ; mais lorsque des machines agricoles ont été embarquées pour la Chine et qu’elles sont restées en souffrance pendant plus de dix-huit mois dans un port Japonais, puis retrouvées inutilisables par suite de ce retard, détériorées jusque dans les plus petites parties, telles que : écrous, boulons, etc., etc., de sorte que tout cet envoi dut être remplacé et embarqué à nouveau d’Amérique ; lorsque des firmes américaines comme Andersen, Meyer and Co, embarquant quelque 900.000 peaux de moutons et de chèvres d’une valeur de plus de 2 millions de dollars, consignées à destination de Hartmann Bros and Co, de Boston en 1916-17, découvrent cinq mois après que toute cette marchandise attend encore à Kobé et qu’ils sont obligés d’envoyer spécialement un employé pour les faire embarquer ; lorsque l’encombrement du chemin de fer Sud-Mandchourien est tellement grand que seuls le Gouvernement Japonais et les marchands nippons influents peuvent expédier dans le nord de la Mandchourie ou dans la Sibérie Orientale ; et lorsque même le matériel et les approvisionnements de la Croix-Rouge embarqués de Wladivostock pour Irkoutsk ne peuvent dépasser Kharbin parce que les wagons du Trans-Sibérien sont chargés au plein par les marchandises Japonaises portant l’inscription « armes et munitions », on peut bien imaginer les conséquences d’une hégémonie Japonaise sur le continent Asiatique et d’un contrôle maritime dans le Pacifique, et comment cela pourrait affecter directement les Etats-Unis aussi bien que l’Angleterre.

L’Émigration japonaise.

On a beaucoup dit et beaucoup écrit sur cette question la plus critique de ce jour, qui absorbe toute l’attention des hommes d’État de l’Amérique et du Japon, tandis que l’Angleterre et les autres membres de la Société des Nations guettent avec beaucoup d’intérêt la publication du projet de loi californienne.

De nombreux hommes politiques Américains et Anglais (spécialement les Australiens) sont enclins à croire, comme le Japon a besoin d’expansion pour son surcroît de population, qu’il serait bon de lui laisser les mains libres dans sa pénétration économique et dans sa domination politique sur le continent Asiatique, afin de sauver leur propre territoire d’une menace de race. Ceci peut paraître logique à première vue, mais cela ne sera jamais praticable ni pour le Japon ni pour les autres Nations intéressées. En premier lieu la Chine elle-même se trouve déjà fortement surpeuplée et a besoin d’un exutoire, pour ses travailleurs, en Mandchourie, en Mongolie et en Sibérie ; de plus ces régions ayant un climat des plus sévères, les Japonais trouvent impossible de pouvoir lutter contre les Chinois ou contre le climat.