premières ; avec le retard de l’Angleterre par suite de ses quatre ans et demi de guerre en Europe, le Japon a été à même de pouvoir accaparer systématiquement tout le coton brut de la Chine et de remplacer les cotonnades et les shirtings de Manchester sur le marché chinois. Il importe à présent les laines de Chine de telle sorte que bientôt la production des métiers nippons remplacera les lainages d’Angleterre. Ceci n’est qu’une des multiples causes démontrant que l’Angleterre ne gardera plus longtemps son prestige commercial en Chine.
Si on laisse le Japon continuer son programme actuel de domination politique et économique du Continent asiatique, l’Angleterre, l’Amérique et les autres Nations de l’Europe seront obligées de se maintenir à l’écart de l’Extrême-Asie de sorte que le Japon puisse avoir les « mains libres », puisque l’art. 3 de l’Alliance anglo-japonaise de 1905 déclare spécifiquement que la Grande-Bretagne reconnaît au Japon « des droits et des intérêts primordiaux en Corée » et lui laisse les « mains libres », « pourvu, toutefois, que ces mesures ne soient pas contraires au principe de l’égale opportunité pour le commerce et l’industrie de toutes les nations ». Les événements ont démontré que cette clause conditionnelle ne valait même pas le papier sur lequel elle était écrite, pas plus du reste, que la clause reconnaissant et garantissant l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Corée du premier Traité d’Alliance anglo-japonaise de 1902 et des autres traités signés par le Japon avec la Corée, la Chine et la Russie.
Tous les intérêts américains et européens en Corée ont été à peu près rachetés et « placés sous le contrôle direct » du gouvernement général japonais. Même les quelques exploitations minières qui sont encore la propriété de l’Amérique, de l’Angleterre et des autres nations occidentales ont dû subir la rigueur des récentes lois minières interdisant toute nouvelle concession aux étrangers. Aussi le statut des concessions existantes appartenant aux étrangers peut-il être changé ou même être aboli à n’importe quel moment et à l’entière discrétion du Gouvernement général de Corée. Avec le changement des tarifs douaniers aucune industrie, aucun commerce étranger ne peuvent être établis en Corée. Ceci est également vrai pour Formose, la Mandchourie, partout où la prédominance de l’influence nipponne se fait sentir. Les intérêts américains et étrangers au Chantong sont incontestablement sur le point de subir le même sort ; ne serait-ce que citer comme exemple le cas de la Standard Oil Company de New-York et celui des propriétés des Missions. Cet état de chose s’est développé depuis ces dernières vingt ou vingt-cinq années, et surtout depuis la guerre russo-japonaise de 1904-1905.
Un simple regard sur la carte d’Extrême-Orient :
Le Japon, qui forme une barrière naturelle à la Chine, à la Corée et à la Sibérie orientale, a obtenu cette situation géographique puissamment stratégique par l’acquisition de Formose en 1895 et la partie inférieure de Sakhaline en 1905. Grâce à la Conférence de la Paix, il put s’étendre dans les mers du Pacifique jusqu’à l’Équateur en acquérant les Îles Caroline et Marshall, et tout récemment, il a mis la sur le reste de la partie supérieure de Sakha-
