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En 1902, la première alliance anglo-japonaise stipulait expressément que :

« Les Hautes Parties Contractantes reconnaissent mutuellement l’indépendance de la Chine et de la Corée, déclarent n’être absolument influencées par aucune idée d’agression contre l’un quelconque de ces pays » (art. 1, Traité d’Alliance anglo-japonais, 30 Janv. 1902). Dans le traité révisé, signé à Londres le 12 août 1905, la clause ci-dessus était omise à dessein pour ce qui concerne la Corée ; à sa place, l’art. 3 du nouveau Traité disait :

« Le Japon possédant des intérêts primordiaux politiques, militaires et économiques en Corée, la Grande-Bretagne reconnaît le droit au Japon de prendre telles mesures de conduite, de contrôle et de protection en Corée s’il le juge utile et nécessaire pour protéger et augmenter ses intérêts, pourvu toujours que ces mesures ne soient pas contraires au principe de l’égale opportunité pour le commerce et l’industrie de toutes les Nations ».

Ceci est encore plus significatif du fait qu’il était suivi de l’article 4, ainsi conçu :

« La Grande-Bretagne ayant un intérêt spécial en tout ce qui concerne la sécurité de la frontière des Indes, le Japon lui reconnaît le droit de prendre telle mesure qu’elle jugera nécessaire dans la proximité de cette frontière afin de sauvegarder ses possessions de l’Inde ».

En d’autres termes, l’Indépendance de la Corée et son intégrité territoriale étaient marchandées entre l’Angleterre et le Japon, et dont le prix était que le Japon ne se mêlerait pas des possessions indiennes de l’Angleterre ni de ses frontières.

L’Angleterre ne se rendait pas exactement compte des conséquences de l’omission précitée de la clause reconnaissant expressément l’Indépendance de la Corée et remplacée par l’art. 3 du Traité révisé en 1905 ; néanmoins le résultat fatal était que le Japon obtenait une emprise étroite sur la Corée. L’Empire russe, à la suite de la guerre-russo-japonaise de 1904-05, était forcé d’abandonner ses ambitions d’expansion territoriale en Extrême-Orient et par le Traité de Portsmouth il était obligé de reconnaître que : « Le Japon possédait en Corée des intérêts politiques, militaires et économiques primordiaux », et « de s’engager à ne pas empêcher ni à intervenir dans les mesures de conduite, de protection et de contrôle que le Gouvernement impérial du Japon jugerait nécessaires de prendre en Corée ».

Ces termes sont presque identiques à ceux de l’art. 3 de l’Alliance anglo-japonaise dont nous venons de parler, et conclu juste un mois après. Si le Japon n’avait pas obtenu « la main libre » en Corée par l’insertion de telles clauses dans ces deux Traités respectifs, les Etats-Unis d’Amérique n’auraient probablement pas eu cette attitude de silencieux acquiescement lors du Traité de protectorat de la Corée extorqué par le Japon en novembre 1905, et transformé en annexion en 1910. Au moment de la révision du Traité d’Alliance en 1905, l’ancien gouvernement coréen envoya au ministre britannique en Corée à Séoul, une note formelle de protestation contre l’omission de la clause mentionnée plus haut comme portant un préjudice aux destinées de la Corée dans sa qualité de nation indépendante. Cette note fut ignorée comme on semble vouloir ignorer, aujourd’hui, la protestation énergique de la Chine contre la prolongation du Traité actuel d’Alliance anglo-japonaise.

Sans énumérer les autres Traités, Conventions ou Accords qui ont créé et augmenté les prétendues « sphères d’influence » en Chine ou dans les autres parties de l’Asie-Orientale par les différentes Nations, nous devons rappeler l’attitude des puissances, à l’exception des Etats-Unis, vis-à-vis des