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raisons trop faciles à comprendre, la police nipponne ne le permit pas. Mais, et là est le côté amusant de l’aventure, un des membres américains, M. Hugh S. Hersman n’en ayant pas été avisé s’était rendu seul à ce meeting. Il fit, dit-on, un très joli discours où il déclara : « Être très heureux de pouvoir enfin voir quelque chose de la Corée avant de quitter le pays », et précisément, à ce même moment, les Japonais lui firent voir comment ils pacifiaient la Corée. Une troupe de police faisait irruption dans le hall, frappant les Coréens pour les écarter et enjoignant à M. Hersman de quitter la salle séance tenante. M. Hersman refusa énergiquement et ce ne fut qu’après de longs palabres qu’il consentit à sortir.

Les Japonais n’ont donc pas réussi à mettre un rideau entre la réalité et les regards américains.

La résistance coréenne continue plus forte que jamais et les jours qui vont suivre nous apprendront certainement de gros événements dans ce coin du monde extrême-oriental.

Une déclaration du général Utsunomiga, commandant les forces japonaises en Corée, au correspondant du Yamato Shimboun, nous montre nettement que la situation devient de plus en plus difficile pour le Japon : « La situation a été très aggravée par l’organisation et l’activité des Coréens patriotes en Mandchourie ». Le général exprima l’opinion que la modération des moyens de police en Corée était impossible pour le moment : « Car une véritable révolution peut éclater d’un moment à l’autre ». (Associated Press. Tokio, 28 août. — New-York Tribune, 29 août).

II. — La fin du régime de la « porte ouverte » en Corée

On se rappelle qu’en 1910, au moment où il annexa la Corée, le gouvernement japonais dénonça tous les traités de commerce passés par le Gouvernement de l’Empire du Matin Calme avec les nations. étrangères. À la suite de cette dénonciation, des négociations s’engagèrent entre Angleterre et Japon dans le but de ménager la transition entre le régime qui venait d’être aboli et celui que voulait introniser le gouvernement de Tokio. De là un accord aux termes duquel les Anglais devaient jouir pendant dix années, à partir du moment de l’annexion d’un régime de liberté du commerce, sous des conditions déterminées, dans certains ports de la Corée. C’est précisément ce régime transitoire qui va prendre fin le 29 août 1920, le gouvernement britannique n’ayant nullement l’intention d’en demander le maintien au Japon à la veille de la date où peut être dénoncé, s’il ne doit être renouvelé, le traité d’alliance anglo-japonaise conclu, ou plutôt renouvelé en 1911. Voilà ce que M. Harmsworth a récemment indiqué à la Chambre des Communes. Le Japon pourra donc dans quelques semaines, régler complètement selon son plaisir le régime douanier de la « pauvre et douce Corée », qui se trouvera, ainsi, encore plus étroitement placée sous l’emprise nipponne[1].

(L’Asie française, septembre 1920).
  1. Voir La Corée Libre, No 1, page 20.