Page:La Corée Libre, numéro 6, octobre 1920.djvu/15

Cette page n’a pas encore été corrigée
— 151 —

de faire converger tous leurs efforts vers les questions de politique étrangère. » Ces Shibusawas et ces Vanderlips sont étonnants : ils s’imaginent que l’aptitude à vendre du savon ou des cotonnades est une preuve péremptoire de supériorité universelle et que deux peuples qui font du commerce ne sauraient être ennemis.

Reste que la tension est grandissante entre les deux pays : « Une des tâches les plus difficiles pour le futur président des Etats-Unis, dit la Washington Post, sera de tenter d’éviter des complications avec le Japon. »

Le traité d’alliance entre l’Angleterre et le Japon expire le 13 juillet 1921 et la décision de dénonciation doit être communiquée un an à l’avance. Il sera sans aucun doute modifié, s’il est renouvelé ; il avait été conclu contre la Russie et l’Allemagne. Cette fois, c’est contre les États-Unis que serait tournée la pointe, et l’Angleterre n’entend pas jouer une telle partie au profit du Japon. Il y aura une réserve à ce propos. D’où déception pour le Japon. Cela diminue les risques de guerre dans le Pacifique et nous ne pouvons que nous en réjouir, car la pire aventure qui pourrait nous advenir serait un conflit armé mettant aux prises — ou intéressant — l’Angleterre et l’Amérique : l’Allemagne profiterait infailliblement de l’occasion. Si le péril est écarté, il n’est pas conjuré. Que fera le Japon ? Car il cherchera des appuis dans le cas d’un conflit éventuel. Il serait prématuré de discuter maintenant la solution du problème ; au moins peut-on envisager quelques possibilités.

Du côté de la Russie, rien à espérer pour le Japon : la Russie est en proie à l’anarchie, et d’ailleurs le sentiment anti-japonais y est très fort. Au Mexique, peut-être y aurait-il de meilleures chances ? Mais le général Huerta ne pourra consolider son pouvoir que s’il s’arrange avec les Etats-Unis, qui exigeront l’exclusion des Japonais. Les États du sud de l’Amérique sont assez accueillants aux Japonais, parce qu’ils ont besoin de main d’œuvre ; mais on doute fort qu’ils s’engagent dans de la grande politique contre les Etats-Unis. L’Allemagne ? elle est impuissante pour longtemps et, de plus, déconsidérée pour sa maladresse comme pour ses crimes. Peut-être l’action du Japon se fera-t-elle exclusivement asiatique, et c’est de ce côté qu’il convient de veiller. Si, par une politique adroite en même temps que généreuse, elle désarmait l’hostilité de la Chine, le rôle pourrait la tenter de se faire contre la race blanche le protagoniste de la race jaune. Ne perdons pas de vue ce qui se fait en Extrême-Orient. »

Lucien Cornet, Sénateur,
Rapporteur du Budget des Colonies.
(Les Annales Coloniales, 14 Septembre 1920.)

« Une rumeur inquiétante est venue jusqu’à nous. Elle a pris cours dans la presse anglo-américaine. Reconnaissons qu’elle présente quelque consistance. Ce n’est pas qu’un énorme canard.

Si monstrueux que la chose paraisse, il y a danger de guerre entre les États-Unis et le Japon.

Ce danger n’est pas nouveau et il y a longtemps que l’on s’en est préoccupé en Amérique.