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l’échec qu’y éprouva si justement l’Allemagne, ne furent pas sans influence sur la déflagration de l’effroyable guerre. Aujourd’hui, c’est l’Asie qui pose les problèmes les plus inquiétants. L’Afrique, l’Asie ! comparez sur carte la masse effroyable de ces continents et l’Europe exiguë dont sont sortis les conquérants et les colons. C’est un effort gigantesque qu’il a fallu déployer là depuis 150 ans. Puisse l’Europe ne pas être vaincue par sa conquête !

Car le problème asiatique se présente beaucoup plus compliqué que le problème africain. En Asie, nous avons affaire, non à des sauvages, mais à des civilisations antiques dont sont fières des nations comptant, comme l’Inde 300 millions, comme la Chine 500 millions d’hommes. De plus, une des nations de l’Asie s’est placée, par son extraordinaire aptitude à s’adapter, sur le même pied que les nations européennes, et elle constitue, pour les peuples soumis et pour les peuples menacés, un exemple et une promesse. Ce n’est pas tout : ce peuple essaime sur toutes les côtes d’un Océan où il est considéré comme un danger par presque tous les occupants : la Chine ne veut pas de la domination économique du Japon ; l’Amérique et l’Australie ne veulent pas de sa population. Ses îles surpeuplées, cherchent en vain des terrains de colonisation, et la famine menace à chaque instant ses peuples.

Jusqu’en 1890, les Etats-Unis avaient libéralement accueilli les Japonais, et ceux-ci s’étaient établis nombreux dans l’État de Californie. Mais ces peuples pullulants de l’Asie constituent vite un danger. De plus, ils sont à peu près tous, qu’ils viennent de Palestine ou qu’ils viennent de l’Extrême-Orient, rebelles à l’assimilation, qui serait pourtant le salut : « Les Japonais, dit la Washington Post, sont si différents des blancs, qu’il n’y a aucune possibilité, ni aucun désir, d’un côté comme de l’autre, de mêler les deux sangs. Les habitudes économiques des deux races sont une cause de conflit. Les établissements japonais se répandent peu à peu dans des villes qui sont purement japonaises. Les blancs ne peuvent pas y vivre et ils ne le voudraient pas, même s’ils le pouvaient. Le robuste orgueil japonais éclate dans l’attitude des immigrants. Ils considèrent bien vite le pays comme étant le leur, bien qu’ils n’aient aucun souci de la politique, et ne prennent aucun intérêt aux affaires américaines. La différence des races engendre des malentendus, des querelles et une animosité plus forte d’année en année… »

Tout récemment, cette animosité fut exacerbée par des incidents con- cernant le droit de propriété des Japonais en Californie. Non seulement il est interdit aux immigrés de posséder terres ou maisons ; mais encore une décision de principe de la Cour de justice interdit aux Japonais de gérer les biens de leurs enfants nés en Amérique, et par conséquent citoyens américains. C’est la race que l’on veut atteindre, le caractère indélébile de l’individu. Les Japonais de l’empire se sont montrés fort irrités : « Quelle mesure, dit l’Osaka Maïnichi, notre ministre des Affaires Étrangères compte-t-il prendre contre une attitude aussi ouvertement antijaponaise ? Le manque d’égards de l’Amérique dans les relations internationales pèse désagréablement sur le monde entier. Aujourd’hui que le Japon en est la victime, le temps n’est plus à la critique, mais aux actes ; il faut agir sans tarder. >>

Depuis lors, une Conférence officieuse à laquelle assistaient des commerçants et des financiers n’aboutit qu’à des vœux et d’étranges résolutions qui rappellent les conseils de l’orfèvre Josse : « Il appartient aux commerçants et aux industriels, dont l’intelligence et le talent sont remarquables,