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L’opinion Étrangère


1. — LE PAYS DU MATIN CALME


Le hasard a voulu que ce fut l’ambassadeur du Japon qui fit fonction de doyen du corps diplomatique à l’occasion de la première réception de ce dernier par M. Paul Deschanel.

À M. Matsui qui venait de lui exprimer ses félicitations et ses veux, le président de la République répondit entre autres.

« Après l’effroyable tourmente qui a si longtemps bouleversé le monde, les peuples ont un immense besoin de repos, d’ordre et de travail. Nous avons encore beaucoup à faire pour établir les statuts de la paix et pour ramener une ère de tranquillité et de prospérité. Soyez assurés que le gouvernement, le Parlement et le peuple français vous y aideront de toutes leurs forces :

« Cette politique ne peut être fondée que sur le droit, sur le respect des traités. »

Le destin a de ces ironies, surtout d’avoir fait dire par M. Deschanel, à l’ambassadeur japonais, ces dernières paroles :

« Cette politique ne peut être fondée que sur le droit, sur le respect des traités. »

L’Impérialisme Nippon

Involontairement, en les lisant, le dessin qui ornait la couverture d’une plaquette parue récemment, se replaçait sous mes yeux. La brochure est intitulée : Quelle est la valeur des promesses japonaises ? Le titre en indique la tendance et le dessin, le contenu. Une bande de terre figure une presqu’île à l’extrémité de laquelle se dresse un mât avec l’inscription Corée. Devant, croisent, fermant la route de la mer, les cuirassés de l’empire du Soleil Levant. Dessus, une armée innombrable couvre une grande partie de la surface du pays, pendant que se dresse un guerrier japonais tout botté éperonné, qui semble la commander. Il porte en écharpe, sur sa poitrine, un grand cordon, où se détache, en grands caractères, le mot Impérialisme. De ses deux mains étendues, il montre, à droite, la multitude de soldats ; à gauche, les puissants vaisseaux de guerre. Sous ses bottes gît un chiffon de papier déchiré, et, sur ce chiffon de papier qu’il foule, les mots : Traité de 1905.

Une légende accompagne l’image et sert à l’expliquer par un rapprochement de dates : Vandalisme japonais en Corée, 1919.

Un pied sur le Continent

Un simple coup d’œil sur la carte de 1’Extrême-Orient suffit pour faire comprendre l’importance attachée par le Japon à la possession de la Corée. C’est sa situation géographique qui a fait le malheur de Chosen, le nom que lui donnent les Japonais. De même que le grand empire insulaire avait autrefois un intérêt immédiat à ce que les Coréens fissent respecter leur neutralité par la Chine et par la Russie, il en a un encore plus puissant aujourd’hui à rester le maître incontesté de leur pays. Avec celle du Liao-Toung, la grande péninsule Corée est, en effet, la tête de pont qui relie l’empire du Soleil-Levant à la terre ferme. Sans cette de pont, le Japon continuerait à se trouver trop à l’étroit dans son chapelet d’îles et il serait fort