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débandés et les chefs patriotes se formèrent en ce qui fut connu sous le nom de « juste armée ». Ils soutinrent la lutte jusqu’à ce jour en dépit de la formidable armée japonaise qui a tendu un véritable filet d’un bout à l’autre de la péninsule.

Les Coréens surveillèrent toujours les événements mondiaux, sachant l’influence qu’ils auraient sur l’avenir de la Corée. En dépit de tous les efforts faits par les Japonais pour bâtir une véritable « muraille de Chine » autour du pays, pour empêcher que la situation de la Corée soit connue du monde extérieur et qu’aucune nouvelle n’y pénétra du dehors, ils savaient néanmoins que la Grande Guerre européenne se livrait pour l’amour de la justice et de l’humanité. Ils entendirent le principe wilsonien de la « libre disposition » pour tous les peuples, aussi bien pour les faibles que pour les forts.

Dès que l’armistice fut déclaré, un mouvement spontané se produisit en Corée, en vue de faire savoir au monde la volonté formelle du peuple Coréen de se libérer de l’oppression étrangère.

Dès la fin de novembre, un effort fut fait pour envoyer des représentants à la Conférence de la Paix à Paris. Ce premier mouvement fut connu des autorités japonaises en Corée et provoqua l’arrestation d’environ 200 Coréens en décembre 1918. Ce qui n’empêcha pas les initiateurs de poursuivre leur organisation en communiquant avec toutes les associations à l’étranger ; des délégués furent choisis pour représenter le peuple et la nation de la Corée entière à la Conférence de la Paix. Et ce choix fut dûment ratifié par le Gouvernement provisoire de la République Coréenne.

Et même temps fut formée l’Union Nationale d’Indépendance Coréenne qui comprenait toutes les classes et organisations et, en outre 2.000.000 de Chundokyoins (une secte politico-religieuse du pays), 1.000.000 de Bouddhistes, 500.000 membres de l’Église chrétienne et 1.500.000 de Confucianistes. Tous s’unirent dans le même but, sans distinction de classe, de croyance, de secte ou de religion. L’Indépendance de la Corée fut déclarée le 1er mars 1919 par les cinq millions d’habitants de Séoul et de toutes les principales cités de la Corée. Il y a maintenant plus de 300 centres révolutionnaires, et chaque petite ville et village, même des régions les plus reculées, se sont joints au mouvement.

Le premier jour de la démonstration à Séoul, il y eut plus de 100.000 participants qui paradèrent dans les rues de la ville et couvrirent les collines des alentours. Le cri unanime de la nation : « Taihan Toknip Man Sei ! » (Vive l’Indépendance de la Corée !) se répercuta non seulement d’un bout à l’autre de la Corée, mais trouva aussi un écho en Mandchourie, en Sibérie et à l’étranger.

Les représentants qui signèrent la Déclaration de l’Indépendance ne firent pas mystère de leur participation au mouvement et se laissèrent froidement arrêter. Comme ils passaient à travers les rues dans les automobiles de la police, la foule les acclama criant : « Taihan Toknip Man-Sei ! ». Les prisonniers du fond des automobiles crièrent à leur tour « Taihan Toknip Man-Sei ! » avec un sourire aux lèvres.

Les étudiants des collèges, des hautes écoles et des écoles primaires, y compris les institutions dites du Gouvernement dont le nombre est de 10.000 (à Séoul seulement) prirent à la manifestation la part la plus active. La parade avait généralement à sa tête les jeunes filles des hautes écoles du Gouvernement.

Des démonstrations similaires eurent lieu simultanément dans toutes les principales cités du nord de la Corée, telles que Pyung-Yang, Syen-Chun, et Shin-Eui-Chu, etc. Le second et le troisième jour, la démonstration devint de plus en plus importante jusqu’à ce que le mouvement se répandit au sud de la Corée et atteignit presque chaque ville et village à travers le pays tout entier. Même les agents de police et les gendarmes coréens au service japonais rejetèrent leurs sabres et leurs carabines, déchirèrent leurs uniformes et se rallièrent au cri de « Taihan Toknip Man-Sei ! »