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de certaine puissance étrangère (le Japon) et en partie à nos propres erreurs. Au début de la guerre russo-japonaise, le gouvernement japonais nous demanda d’entrer en alliance avec lui, lui permettant l’usage de notre territoire, de nos ports et de toute autre ressource, afin de faciliter ses opérations navales et militaires. Le Japon de son côté s’engageait à garantir l’indépendance de la Corée et le bien-être et la dignité de la Maison Royale Nous accomplîmes les demandes du Japon, nous remplîmes loyalement nos obligations et nous exécutâmes tout ce à quoi nous nous étions engagés. Par ces faits, nous nous mîmes dans une telle position que si la Russie avait été victorieuse elle aurait pu s’emparer de la Corée et l’annexer du fait que nous étions les alliés actifs du Japon !

Il est de toute évidence à présent que le japon se propose d’abroger ses propres engagements du Traité et de déclarer bientôt son Protectorat sur notre pays, en contravention directe avec ses promesses jurées dans le traité de 1904. Les raisons sont multiples pour que cela ne soit pas accompli.

En premier lieu, le Japon se déshonorera en brisant ainsi son serment ; il fera injure à son prestige de puissance qui se fait un point d’honneur de contribuer au progrès des lois.

En second lieu, l’attitude du Japon en Corée, depuis ces deux dernières années, ne promet pas à notre peuple qu’il sera conduit d’une manière généreuse. Aucun recours ne nous est offert contre les méfaits dont notre peuple a souffert ! La situation financière de notre pays a été gravement compromise par le Japon. Rien n’a été fait en vue du progrès de notre éducation et de la justice ! Toutes les actions du Japon chez nous n’ont été que des actes d’égoïsme !

La destruction de l’indépendance de la Corée fera beaucoup de mal à notre pays, car elle intensifiera les mauvais traitements des Japonais sur notre peuple coréen et rendra leurs actes de plus en plus oppressifs.

Nous reconnaissons que de nombreuses réformes sont urgentes en Corée. Nous serions heureux d’avoir l’aide amicale et les conseils des Japonais et nous sommes prêts à appliquer loyalement leurs suggestions. Nous reconnaissons les erreurs du passé. Nous ne plaidons pas pour nous personnellement, mais pour notre cher peuple coréen !

Au début de la guerre, notre peuple reçut les Japonais avec bienveillance, car ils semblaient venir nous aider aux réformes pour améliorer notre situation générale ; mais bientôt nous nous aperçûmes avec une triste amertume de notre déception !

Un danger des plus graves qui suivrait le protectorat du Japon serait la perte totale pour notre peuple du goût au progrès. Plus aucun espoir ne lui resterait de recouvrer la liberté ! Il faut à notre peuple, comme à tous les autres, l’espoir d’un sentiment national pour les encourager au progrès et à la persévérance. Mais l’extinction de la nationalité le conduira au désespoir et au lieu de travailler avec joie et loyauté en collaboration avec le Japon, l’odieux état de chose du passé s’accentuera encore plus et il n’en résultera que suspicion et animosité.

On a dit que les sentiments n’avaient rien à faire dans de telles affaires. Mais nous croyons, au contraire, que le sentiment est la force vitale dans toutes les questions de l’humanité, et que la bonté, la sympathie et la générosité sont encore les facteurs actifs dans les relations entre nations aussi bien que dans celles des individus.

Nous vous prions d’apporter dans cette question le même étai d’esprit et le même calme de jugement qui ont toujours caractérisé vos actes jusqu’à ce jour, et ayant consciemment pesé les choses, de nous apporter l’aide que vous pourrez en ces circonstances de danger national pour nous !

(Sceau privé de l’Empereur)

Le Gouvernement du Japon furieux de cet appel au Monde civilisé débarqua des troupes, fit cerner le Palais de Séoul (une fois de plus) et, sous la menace des fusils et des mitrailleuses, ordonna aux ministres coréens de se réunir en conseil afin de les obliger à signer séance tenante une Con-