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Que si ton tonnerre passe outre
Et si tu consens à m’absoudre,
Touché des pleurs que tu vois sourdre
Dans un cœur où tu n’étais pas,
Prends pour guérir mon âme triste
Cette main que l’angoisse crispe
Quand je songe au ciel que je risque
En ne marchant point sur tes pas.

Sans chercher rien qui me disculpe
Des plaisirs faux dont je fus dupe,
J’entrerai dans la route abrupte
Qui est le chemin de la croix,
Et si par grâce tu m’acceptes,
À jamais courbé sous ton sceptre,
Je fais vœu de suivre à la lettre
Les commandements de ta loi.


EMILE SCHALLER.




SONNET



Les souvenirs du temps passé me sont très durs,
Chassez l’obsession des formes revenues.
Allez ! Faites monter des roses sur les murs
Plantez des arbres verts entre les avenues.

Je sens flotter dans l’air des odeurs inconnues.
Est-ce le lourd parfum des raisins déjà mûrs…
…Elle avait des yeux clairs et des pensers obscurs,
Des mots lascifs avec des poses ingénues.

Les souvenirs du temps passé restent en nous
Nous avons beau prier et pleurer à genoux
On n’exorcise pas leur mirage rebelle.

Et cela reste en nous comme un parfum trop fort,
Ou comme un vieux refrain boîteux que l’on épèle…
— Mon Dieu ! Trouverons-nous le repos dans la mort ?


LÉON BLUM.