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introduction, § x.

ne peut recevoir une solution assurée, parce que les moyens de contrôle nous manquent : le récit de l’insurrection de Toulouse est, chez Pierre de Vaux-Cernai, très bref, et l’évêque de Toulouse n’y paraît pas[1]. G. de Puylaurens nous montre l’évêque s’entremettant entre les deux partis, afin d’obtenir que la ville soit simplement mise à rançon, et il laisse entendre qu’en donnant ce conseil il en avait prévu les conséquences. « Ceux qui donnaient ce conseil, dit-il, savaient bien que pour lever cette taxe[2] il faudrait avoir recours à des violences générales et particulières qui amèneraient les Toulousains à se souvenir avec regret de leur liberté d’autrefois et à revenir à leur ancien seigneur[3] », ce qui est exposé plus à plein dans la suite du chapitre.

Il y aurait donc eu, aux yeux de G. de Puylaurens comme du poète, un piège tendu par Folquet aux habitants. Mais il n’y a peut-être pas grand fond à faire ici sur G. de Puylaurens, ce chroniqueur ayant pu s’inspirer, comme je l’ai indiqué plus haut, du poème. Ce qui paraît devoir être admis comme étant entièrement conforme à la vraisemblance, c’est l’intervention de Folquet, qui sans doute se sera engagé plus qu’il n’était autorisé à le faire, sans se soucier d’être ensuite désavoué. Une certaine part de mauvaise foi peut toujours être légitimement supposée dans les transactions des chefs ecclésiastiques de la croisade avec leurs adversaires, et cette mauvaise foi était excusée et même louée, en raison du but à atteindre. Pierre de Vaux-Cernai, racontant en une autre occasion une négociation conduite par un légat avec les habitants de Narbonne dans l’intention avouée de les tromper, exprime une admiration sans

  1. Fin du ch. LXXXIII ; Bouquet, XIX, 107 c.
  2. 30,000 marcs, comme dans le poème, voy. ci-dessus, p. xviij.
  3. Ch. XXIX.