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introduction, § ix.

était du diocèse de Toulouse et qu’il composait son poème pendant les derniers mois de l’année 1218 et les premiers de l’année 1219.

Qu’il ait été du diocèse de Toulouse, c’est ce qui semble bien résulter du v. 3405 où l’évêque de Toulouse Folquet est appelé « notre évêque ». Faut-il aller plus loin et supposer qu’il était de Toulouse même ? On pourrait invoquer à l’appui de cette opinion les nombreux passages où Toulouse est exaltée avec des éloges enthousiastes. Elle est associée à Parage[1], c’est-à-dire à Noblesse, mot qui doit être entendu dans le sens le plus large, s’appliquant à la fois à la naissance et au caractère[2]. Lorsqu’en 1216 Toulouse est démantelée et ruinée par ordre de Simon, l’auteur s’écrie avec désespoir : « Ah ! noble Toulouse, vous voilà les os brisés ! Comme Dieu vous a livrée aux mains de brigands[3] ! » Et quelle joie, quels transports quand Toulouse, la gentils Tolosa, se relève ! Elle est accomplie en tous biens ; chez elle règnent Parage et Merci ; aidée de Droiture elle a chassé Orgueil[4] ; c’est Dieu et Droit qui prennent sa cause en main, qui la gouvernent et la défendent[5]. Son éloge se retrouve dans la bouche même de ses ennemis. « Si vous avilissez Toulouse, » dit à Simon l’un de ses conseillers, « vous serez vous-même abaissé, car si la fortune lui est

  1. V. 5569.
  2. Parage, qui occupe dans la seconde partie du poème la place qu’un poète moderne accorderait à l’idée de patrie, a été plus d’une fois célébré par les troubadours ; voir par ex. la pièce Molt era dous el plazeus (publiée par E. Stengel, Rivista di Filologia romanza, I, 41), qui lui est tout entière consacrée, et le sirventès Vai Hugonet ses bistensa (Parn. occit., p. 392), adressé au roi d’Aragon peu avant la bataille de Muret.
  3. V. 5646-7.
  4. V. 6437-8.
  5. V. 6250-4, 6442, 9577-8.