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croisade contre les albigeois.

Soissons[1] ! et Bretagne ! Ceux de la ville sont tellement déterminés que la lutte les passionne et redouble leur hardiesse ; pas un ne bouge, mais ils tiennent bon, [8595] observant et attendant de pied ferme les lignes qui accourent vers eux. Ils crient : « Toulouse ! la restauratrice et la victorieuse ! Comminges ! pour le comte preux et vaillant, Casnac ! Creixell ! Villemur le bon combattant ! [8600] car son enseigne[2] leur est sur les dents. » Mais l’éclat des heaumes, l’or fin, l’argent, le blanc et le rouge, les couleurs, le vernis [des boucliers], les enseignes de soie brillantes et flottantes, les clairons retentissants, les trompettes éclatantes, [8605] excitent l’ardeur et raffermissent les courages. Là où ils se rencontrèrent il y eut carnage : de faucilles, de haches, de piques aiguës, de guisarmes, de flèches, de carreaux pointus, d’écus beaux à voir, de couteaux luisants, [8610] ils se frappent et se combattent si fièrement qu’ils tranchent et taillent dans la chair et dans les armures. Il y a de tels amas de pieds, de jambes, de bras ; sur le sol il y a tant de sang et de cervelles, que les chemins et l’esplanade sont rouges et sanglants. [8615] Si féroce est la lutte, que, les deux partis subissant des pertes, on se heurte avec les armes, on se prend avec les dents. Tant de la part des assiégés que de celle des assaillants, il n’y a corps ni membre qui ne souffre. [8620] Pourtant ceux de la ville, ayant le dessus, le fer à la

  1. Saisunha « Saxe », Fauriel ; mais cette interprétation paraît ici bien peu vraisemblable.
  2. Celle d’Arnaut de Villemur, dont le cri vient d’être mentionné.