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introduction, § viii.

sion et à indiquer les compositions auxquelles elle peut se rapporter. Le témoignage de G. de Tudèle n’est pas le seul qui constate l’existence d’une chanson d’Antioche, actuellement perdue, ou qui du moins ne nous est pas parvenue sous sa forme première.

Les témoignages que nous possédons à cet égard sont même assez différents de temps et de lieu pour qu’on puisse douter s’ils se rapportent à un même ouvrage ou à des compositions différentes. J’écarte tout d’abord le poème composé par Grégoire Bechada à la prière de l’évêque de Limoges Eustorge. Ce n’était pas, à proprement parler, une chanson d’Antioche, car Geoffroi du Vigeois, qui nous apprend tout ce que nous savons de ce poème[1], donne à entendre qu’il embrassait tous les événements de la première croisade. Mais voici deux témoignages plus positifs. Guiraut de Cabrera, seigneur catalan, et en même temps troubadour, qui composait vers 1170 ou 1180, reproche à un jongleur de ne rien savoir d’Antioche :

D’Antiocha
Non sabes ja
[2].

Lambert d’Ardres, au commencement du xiiie siècle, mentionne le « commendator Antiochenæ cantilenæ » dans des circonstances d’où il résulte que le jongleur (il le qualifie de scurra) qui composa cette chanson vivait dans la première moitié du xiie siècle[3]. Enfin, c’était aussi une chanson d’Antioche que le récit de Richart le Pèlerin que Graindor de

  1. Labbe, Nova bibliotheca, II, 296.
  2. Bartsch, Denkmæler d. provenz. Literatur, 91, 25-6 ; Milá, Trovadores en España, 274.
  3. Chronique de Lambert d’Ardres, édit. Godefroy-Ménilglaise, p. 311. L’éditeur propose avec raison de corriger commendator en commentator.