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croisade contre les albigeois.

compagnie, pour aller défendre la tour avec les membres du Chapitre. Mais si fortes étaient les ondes, si rapide le courant, qu’il ne put y arriver et passa de côté, [7650] tandis qu’à l’autre pont[1] on se battait, recevant et donnant de grands coups mortels. Mais voici que le Chapitre, vaillant et actif, se risque dans l’eau profonde : ils fortifient la tour et la ravitaillent. [7655] Le comte de Montfort, guerrier intrépide, veut ruiner la tour et ses créneaux ; nuit et jour, à coups pressés de pierres de taille, de pierres rondes, le calabre la bat, le pierrier la démolit, [7660] si bien que tout le mur est brisé, avec portes, voûtes, pierres d’arêtes, et que le mortier tombe. Ceux du dedans voyant qu’il n’y a rien à faire, le cœur intrépide, l’imprécation à la bouche, reçoivent tant de blessures, [7665] que leurs braies sont tachées de sang. Pleins de dépit, cédant à la force, le cœur noir, ils abandonnent la tour, où monte le héraut du comte de Montfort et de ses pèlerins qui poussent des clameurs joyeuses.

CXCIX.

[7670] Ils poussent des clameurs joyeuses et crient Montfort ! « Car le terme est venu où nous recouvrerons la terre et vous ferons déguerpir ! » Mais ceux de l’autre tour répondirent : « C’est ce qui sera décidé par le fer au milieu des larmes ; [7675] et si vous êtes mauvais, méchants, vantards, nous

  1. Le sens probable est « à l’autre bout du pont » ; la lutte avait lieu entre les assaillants établis sur la rive gaucbe, et les défenseurs de celle des deux tours qui était la plus rapprochée de cette rive.