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croisade contre les albigeois.

peut bien s’émerveiller de ce qu’une ville sans défense peut ainsi nous résister. — Alain[1], » dit le comte Gui, « vous vous rappelez bien comment les Toulousains nous vinrent implorant, et il paraît que Dieu prête l’oreille aux réclamations et aux plaintes, [6085] car onques le comte mon frère (tant il est dur et tyran !) n’a voulu leur rendre sa bienveillance, ce qui met le droit de leur côté. Et si son mauvais vouloir s’était modifié, nous ne perdrions pas Toulouse, et n’éprouverions pas un revers, car quiconque fait tort à ce qui lui appartient, [6090] son droit c’est de rester en perte[2]. Et, je ne croirais jamais, dût-on me le jurer sur les saints, que ce ne soit pas à cause de nos tromperies que Dieu s’est détourné de nous. Et il y a toute apparence que le mal s’accroît, car leur situation s’améliore, tandis que la nôtre se gâte ; [6095] car tout ce que nous avions gagné en dix ans peut se perdre de ce coup, si Dieu ne nous vient en aide. » Après, s’adressant à ses messagers : « Vous irez, » dit-il, « en Gascogne, y porter mes ordres au seigneur archevêque, à Auch, qu’il se mette en route, et aussi à Guiraut d’Armagnac et à Salto (?)[3], [6100] qu’ils nous

  1. Il est singulier que la réponse de Gui de Montfort soit adressée à Alain de Rouci, quand l’interlocuteur est Foucaut. Faut-il supposer une lacune ?
  2. Même idée qu’au vers 4991.
  3. J’ajoute ces deux noms d’après la rédaction en prose ; voy. la note sur le v. 6099. Je ne sais rien de Salto, nom qui peut bien être corrompu ; mais Guiraut d’Armagnac (Guiraut IV, selon l’Art de vér. les dates, II, 273) répondit en effet à l’appel de Gui de Montfort. À la vérité il ne paraît pas dans la suite du poëme, mais nous avons un acte par lequel il se porte caution, lui et plusieurs autres,