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croisade contre les albigeois.

valeur : puisqu’elle m’enlève la Provence, je reprendrai la Provence à ses frais. — Sire frère, » dit Gui, « un bon conseil : bornez-vous à prendre de toute la richesse de Toulouse le quart ou le cinquième, [5050] les nouvelles pousses donneront de plus belles espérances[1] ; au lieu que si vous la détruisez sans pitié, par toute la chrétienté vous en aurez mauvais renom, et vous vous attirerez la colère de Jésus-Christ et les reproches de l’Église. — Frère, » dit le comte, « tous mes compagnons [5055] veulent me quitter, parce que je n’ai rien à leur donner, et si je détruis Toulouse, je ne le ferai pas sans cause : ils me veulent du mal ; moi je ne leur voudrai pas de bien. Avec l’argent que je tirerai d’eux j’ai l’espoir que je reprendrai Beaucaire et que j’aurai Avignon. » [5060] Maître Robert[2] s’exprima ainsi : « Sire comte, je vais vous faire un sermon bon à entendre[3]. Depuis que le pape vous a élu, vous eussiez dû observer droit et raison, et ne pas causer d’embarras à l’Église. [5065] Puisqu’ils n’ont point commis de trahison envers vous, vous ne devriez pas les ruiner, sinon après jugement. Et si vous observez la justice dans votre poursuite, ils ne doi-

  1. C.-à-d., je pense, « il y aura plus de chances pour que la richesse de la ville se refasse. »
  2. Qualifié de « sage légiste » au v. 5222. Il ne figure que dans les négociations actuelles entre Simon de Montfort et les Toulousains. Il est visiblement avec Simon, s’efforçant toutefois de jouer le rôle d’un conciliateur. Les circonstances dans lesquelles il paraît, l’avis prudent qu’il donne à un Toulousain compromis (voy. v. 5275), portent à croire qu’il était de Toulouse.
  3. Je ne traduis pas ab bela enquestio qui ici et v. 5090, comme souvent enques, est employé sans propriété, en vue de la rime.