Page:La Chanson de la croisade contre les Albigeois, 1875, tome 2.djvu/346

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
214
[1216]
croisade contre les albigeois.

enfoncent murs et portes, ils apportent le feu, et commencent à incendier. Là vous auriez pu voir tendre tant d’arbalètes, [3965] tant de carreaux s’élever en l’air, tant de moellons jetés de haut en bas, lancer tant de pierres, détendre tant d’arcs, les Provençaux combattre, les Français se défendre ! À haute voix les uns s’écrient : « Vous êtes pris ! » et les autres répondent : « Nous vous entendons bien, [3970] mais avant que vous nous preniez, nous nous vendrons chèrement. » Mais la fumée, le feu, la flamme, la chaleur[1], les ont mis en une telle détresse qu’ils ont peine à se défendre[2]. Et l’un dit à l’autre : « Nous ne pouvons leur résister davantage ; rendons-nous à merci avant de nous laisser brûler. » [3975] Pierre de Saint-Prais est entré en négociation pour qu’on le laisse sortir et se rendre vers le comte [de Toulouse][3]. De toutes parts vous eussiez entendu disputer et rivaliser d’efforts, les uns montant, les autres descendant. À haute voix ils s’écrient : « Désormais il ne peut nous mésarriver. [3980] Jésus-Christ glo-

    provenç. 34, 86) : « el filh non agardava lo payre, nil payres lo filh. »

  1. P.-ê. la cendre, en faisant au v. 3971 une légère modification.
  2. Le vers 3972 est corrompu, voy. Romania, IV, 276, et Revue des langues romanes, 2, I, 197-8.
  3. Lacune ici ? voy. au t. I la note du v. 3976. D’après la réd. en prose, qui confond l’attaque de la Redorte avec celle du château proprement dit, les assiégés proposaient de rendre la place à condition d’avoir la vie sauve, condition qui alors fut repoussée, mais que les assiégeants acceptèrent plus tard. — Quant à Pierre de Saint-Prais (dont l’origine m’est inconnue), il faut croire qu’il réussit à se ménager une petite capitulation particulière, s’il doit être identifié avec le « Peire de Saint Praiss » qu’on trouve en 1230 bailli de Lavaur pour le comte de Toulouse (Teulet, Layettes du Trésor, n° 2078).