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croisade contre les albigeois.

comte viennent à genoux, et disent ensemble : « Jésus-Christ glorieux, donnez-nous pouvoir et force pour que nous leur rendions à tous deux leur héritage. » Et si grande est la presse et la procession, qu’il y faut employer les menaces, les verges, les bâtons. [3825] Ils entrèrent au moûtier pour faire leurs prières, puis on servit un repas accompli et savoureux. Il y eut mainte sorte de ragoûts et de poissons, des vins blancs, rouges, girofles et roux ; il y eut des jongleurs avec leurs vielles, des danses, des chansons. [3830] Le dimanche matin eut lieu la cérémonie du serment et des engagements [envers le comte]. Puis tous disent : « Sire légitime et bien aimé, ne craignez point de donner ni de dépenser, nous fournirons l’argent et nos personnes [3835] jusqu’à ce que vous recouvriez la terre ou que nous mourions avec vous. — Seigneurs, » dit le comte, « belle en sera la récompense, car, de par Dieu et de par moi, vous gagnerez en puissance. » Et le comte prend conseil, et avec quelques-uns de ses barons il[1] se rendit à Orange, vaillant et affable. [3840] Entre le comte et le prince [d’Orange][2] fut fait et conclu un traité

  1. Je corrige, avec M. Chabaneau, El au v. 3839.
  2. Guillem du Baus, dit del Cornas, prince d’Orange de 1182 à 1218, et qu’un privilége impérial, resté sans effet, fit un moment roi de Vienne et d’Arles (Rev. des Soc. sav. 6, II, 436-40). Nous n’avons d’ailleurs aucune mention d’une alliance à ce moment entre lui et le comte de Toulouse. Si réellement cette alliance eut lieu, elle ne dura pas longtemps, car il est impossible de ne pas reconnaître le prince d’Orange dans le « Baus » qui paraît au v. 3848, parmi les ennemis du comte de Toulouse, avec Orange et Courtheson. La contradiction entre ces deux mentions si rapprochées et si différentes peut n’être qu’apparente, car il se peut que le