merveille que vous m’ayez mis en demeure d’assigner le pays au comte de Montfort, car je ne vois pas de juste raison pour le faire. » Maître Thédise parla ainsi : « Sire, la fidélité [3490] du comte de Montfort, qui s’est acquis un si grand mérite en chassant les hérétiques et en défendant l’Église, lui devrait valoir la possession de la terre. — Maître, » dit le pape, « il y a bien compensation, puisqu’il détruit les catholiques à l’égal des hérétiques[1]. [3495] Grande plainte et grandes réclamations m’en viennent chaque mois, tellement que le bien baisse tandis que le mal monte. » Par la cour se lèvent [les évêques] par groupe de deux ou de trois ; tous vont au pape et l’interrogent : « Sire, puissant pape, sais-tu où en sont les choses ? [3500] Le comte de Montfort est resté en Carcassais pour détruire le mal et y introduire le bien, et chasser les hérétiques, les routiers, les Vaudois[2] et peupler [le pays] de catholiques, de Normands, de Français. Et puisque sous le signe de la croix il a conquis tout ce pays, [3505] Agenais et Quercy, Toulousain et Albigeois, Foix la ville forte, Toulouse et Montauban, qu’il a mis en la main de la sainte Église, et que l’Église a pris ; puisqu’il a donné et reçu tant de coups, répandu
- ↑ On lit dans les chroniques de S. Aubin d’Angers, à l’année 1210 : « Franci et alii innumeri populi cruce-signantur in pectore, contra Albigenses vadunt ..... facientes immanissimam stragem hæreticorum et catholicorum quos non potuerunt discernere » (Chron. des églises d’Anjou, p. p. Marchegay et Mabille, p. 58).
- ↑ Les Vaudois sont toujours distingués des hérétiques proprement dits ou Albigeois, et considérés, selon les paroles de P. de V.-C. (ch. II, Bouq. 6 e), comme « longe minus perversi » ; voy. la dissertation de P. Jas De Valdensium secta ab Albigentibus bene distinguenda, Lugd. Batav. 1834, in-4o.