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croisade contre les albigeois.

cée ; mais les Français sont mauvais et durs en tout ; ils ont dur courage et cœur de lion. Ils sont fortement irrités [2920] du malheur qui leur est arrivé avec ceux que nous avons maltraités et tués à Pujols. Faisons en sorte de ne pas nous compromettre. » Alors les courtois corneurs sonnent l’assemblée, afin que tous sortent avec leur équipement et se rendent droit à Muret où est le roi d’Aragon. [2925] Par les ponts sortent chevaliers, bourgeois, et le peuple de la ville ; en toute hâte ils sont venus à Muret où ils laissèrent leur équipement, et tant de bonnes armures, et tant d’hommes courtois. Ce fut grand péché, Dieu et Foi me viennent en aide ! [2930] et le monde entier en valut moins.

CXXXVII.

Le monde entier en valut moins, sachez-le en vérité, car Parage en fut détruit et chassé, et toute la chrétienté honnie et abaissée. Or oiez, seigneurs, comme ce fut, et écoutez : [2935] Le bon roi d’Aragon fut à Muret tout armé, et le comte de Saint-Gilles avec tous ses barons ; et les bourgeois de Toulouse et le commun peuple eurent mis en position et dressé les pierriers, et combattent Muret tout à l’entour et de tous côtés, [2940] tellement que dans la ville neuve ils sont tous ensemble entrés, et ont pressé les Français qui l’occupaient, de façon qu’ils durent se réfugier dans le donjon du château. À ce moment un messager est venu au roi : « Sire roi d’Aragon ; sachez en vérité [2945] que les hommes de Toulouse ont si bien fait qu’ils ont pris la ville, si vous le voulez bien, enfoncé les