Page:La Chanson de la croisade contre les Albigeois, 1875, tome 2.djvu/233

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
[1211]
101
croisade contre les albigeois.

près de tierce[1] lorsqu’ils sortirent. Ceux de l’ost venaient de dîner quand ils les vinrent assaillir ; mais le comte de Montfort ne s’était pas désarmé, et beaucoup dans l’ost n’avaient point déposé leurs hauberts ; [1835] tôt et vite ils montent sur les destriers. Là vous eussiez vu frapper des deux parts tant de coups d’épieu sur les heaumes, les faisant retentir, mettre en pièces, fendre, rompre tant d’écus, que vous auriez dit que le monde allait périr. [1840] Eustache de Caux[2], sans mentir, fut tué par ceux de Toulouse — et maint homme en soupira — bien qu’il fût hardi, lorsqu’il s’en voulait revenir et retourner vers les siens.

LXXXIII.

Grand fut le combat, si Jésus-Christ me protége, [1845] lorsque les Toulousains et les Navarrais se lancèrent sur l’ost. Alors vous eussiez vu les Allemands pousser des cris. Presque tous ils criaient : Bar ! Bar ! Bar[3] ! Eustache de Caux, au passage d’un pont, ils lui donnèrent un si grand coup qu’il ne put s’en relever, [1850] d’une lance de frêne au gonfanon vair, tellement que le prêtre ne put être mandé à temps pour

  1. Neuf heures du matin. Cette heure paraîtra un peu matinale, si on considère que les croisés, on va le voir à la ligne d’après, venaient de dîner. P. de V.-C. (chap. LV, Bouq. 49 a) dit aussi que la sortie eut lieu « dum pransi essent nostri, et, ut mos est, post prandium pausarent in meridie ».
  2. Eustachius de Quen (Du Chesne) ou de Queu (Bouquet) dans P. de V.-C. ch. LV (Bouquet, XIX, 49 a b).
  3. Je ne vois pas figurer ce cri parmi ceux qu’a mentionnés Du Cange dans ses deux dissertations (XI et XII) sur le cri d’armes.