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croisade contre les albigeois.

rai. — Jamais je n’ai fait trahison ni tenté de le faire. — Donc, » dit P. Rogier, « vous ne serez pas prisonnier plus longtemps, et je vous livre présentement et moi et mon château. » Il appela un maître[1], le (Bouchart) fit tirer des fers, tondre et baigner délicatement ; et de plus lui a fait donner un beau vêtement et un palefroi bai, [1460] sans condition. Quand Bouchart vit cela, sachez qu’il en fut bien heureux : jamais il n’avait eu si grande joie depuis le temps où il naquit de mère.

LXIV.

Seigneurs, tout ainsi que je viens de vous le dire, [1465] le sire de Cabaret ne s’oublia point : il appela un maître, fit tirer des fers son prisonnier, et le vêtit noblement d’un très-riche vêtement. Il lui donna à chevaucher un palefroi ambiant, tel qu’on n’avait vu plus beau ; et quand il fut bien vêtu [1470] il lui présenta, pour lui faire compagnie, trois damoiseaux montés, et le conduisit jusqu’en dehors [du château] ; mais avant de s’en aller et de se séparer il le mit en possession de sa propre personne et du château, et lui en fit hommage sans aucune restriction. [1475] Et Bouchart lui promit, lui jura et lui garantit que de sa part il ne serait pas trahi, et qu’à la fin, lorsque la lutte sera terminée, on ne le tiendra pas pour fol, et qu’il ne sera pas tourné en dérision. Et il n’y manqua pas, car il

  1. « Un forgeron », Fauriel ; ce qui est possible et même probable, quoique cette acception de maestre ne se soit rencontrée nulle autre part à ma connaissance.