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croisade contre les albigeois.

sont rois du pays et que je n’estime un bouton[1]. Il envoya Lambert de Crécy à Limous, et des autres barons qui au nord, qui au sud, pour garder la terre là où il lui parut bon. [860] Et le comte de Montfort qui a cœur de lion demeura à Carcassonne, gardant en sa prison[2]..... Et le vicomte mourut après de la dyssenterie ; et les mauvais vauriens et la canaille, qui ne savent rien de l’affaire, ni ce qui est ni ce qui n’est pas, [865] disent qu’on le tua de nuit en trahison[3]. Et le comte n’eût pas souffert, par Jésus-Christ du ciel !

  1. Le roi de Portugal était alors Sanche Ier (1185-1211), et celui de Léon Alphonse IX (1188-1214). Ce dernier, au moins, n’a pas toujours été apprécié aussi sévèrement par les troubadours contemporains ; voy. Mila y Fontanals, Trovadores en España, p. 153.
  2. Voir au t. I la note sur le v. 861.
  3. G. de Tud. combat ici la version populaire qui paraît avoir été courante dans le Midi, et qu’il semblait admettre précédemment, au v. 356-7 et 743-4. L’auteur de la seconde partie y croyait évidemment (v. 3361). Le biographe d’Arnaut de Mareuil (écrivant certainement avant 1250) admet le fait comme incontesté, lorsqu’il parle de la comtesse de Béziers « mère du vicomte de Béziers que les Français occirent lorsqu’ils l’eurent pris à Carcassonne » (Raynouard, Choix, V, 45 ; Parn. occit. 15). Je ne compte pas le planh du troubadour Guillem Augier de Béziers sur la mort violente d’un vicomte de Béziers (Raynouard, Ch. IV, 46 ; cf. Hist. litt. de la France, XVIII, 551), ce vicomte pouvant être Raimon Trencavel ( ✝ 1167, Vaissète, III, 17-8) aussi bien que Raimon Rogier ; mais le témoignage d’Innocent III, écrivant au légat que le vicomte avait été « ad ultimum miserabiliter interfectus » (XV, CCXII), montre que ce qu’on peut appeler la version méridionale de la mort du vicomte avait obtenu une créance assez générale. Dans le sens opposé les témoignages en accord avec G. de Tud. sont ceux de P. de V.-C. (ch. XXVI) qui ne mentionne pas l’autre version, et de G. de Puylaurens (ch. XIV ; Bouquet, XIX, 202 d) qui semble en cet endroit avoir copié G. de Tudèle. — D’après un ancien nécrologe (Vaissète, II, pr. 15), le vicomte de Béziers mourut le 10 nov. 1209.