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l’armée ennemie était renforcée par des régiments hongrois portant l’uniforme serbe. Le prince lui-même était inquiet. Un officier d’état-major prussien qui venait de traverser la Serbie ayant reçu l’hospitalité dans le palais du prince Alexandre, à Sofia, lui conta que dans quarante-huit heures au plus tard le roi Milan pénétrerait en Bulgarie. Si bien que le prince dégarnit Sofia de troupes et manda le régiment Struma dans la capitale. Les officiers de ce régiment et les élèves de l’école militaire furent mis au courant des rumeurs qui circulaient ; on leur dit que le seul moyen d’empêcher une invasion austro-serbe était l’intervention du Czar, mais que cette intervention ne serait obtenue qu’en sacrifiant le prince Alexandre. « Que préférez-vous, la patrie ou le prince ? » s’écria Grueff, en s’adressant aux élèves de l’école militaire qu’il entraînait vers le palais. « La patrie ! » répondirent les jeunes gens. Ainsi s’accomplit le criminel coup de main du 21 août. Le lendemain, l’exaltation fit place au repentir, mais le repentir a ceci de particulier qu’il n’arrive jamais assez tôt et que, quand il arrive, il est toujours trop tard.

Nous ne rechercherons pas si c’est, en dernière analyse, l’Union de Philippopoli qui a creusé l’abîme entre la Russie et la Bulgarie, ou si elle