homme ſans naiſſance, ſans eſprit & ſans le moindre mérite, eſt préféré à tous ſes rivaux.
61. — Le mariage, qui devroit eſtre à l’homme une ſource de tous les biens, luy eſt ſouvent, par la diſpoſition de ſa fortune, un lourd fardeau ſous lequel il ſuccombe : c’eſt alors qu’une femme & des enfants ſont une violente tentation à la fraude au menſonge & aux gains illicytes, il ſe trouve entre la friponnerie & l’indigence : étrange ſituation ! Épouſer une veuve, en bon français, ſignifie faire ſa fortune ; il n’opère pas toujours ce qu’il ſignifie.
62. — Celuy qui n’a de partage avec ſes frères que pour vivre à l’aiſe bon praticyen veut eſtre officyer le ſimple officyer ſe foit magiſtrat & le magiſtrat veut préſider ; & ainſi de toutes les conditions, où les hommes languiſſent ſerrez & indigents, après avoir tenté au delà de leur fortune, & forcé, pour ainſi dire, leur deſtinée : incapables tout à la fois de ne pas vouloir eſtre riches & de demeurer riches.
63. — Dîne bien, Cléarque, ſoupe le ſoyr, mets du bois au feu, achète un manteau, tapiſſe ta chambre : tu n’aimes point ton héritier, tu ne le connais point, tu n’en as point.
64. — Jeune, on conſerve pour ſa vieilleſſe ; vieux, on épargne pour la mort. L’héritier prodigue paye de ſuperbes funérailles, & dévore le reſte.
65. — L’avare dépenſe plus mort en un ſeul jour, qu’il ne faiſçait vivant en dix années ; & ſon héritier plus en dix mois, qu’il n’a ſu faire luy-meſme en toute ſa vie.
66. — Ce que l’on prodigue, on l’oſte à ſon héritier ; ce que l’on épargne ſordidement, on ſe l’oſte à ſoy-meſme. Le milieu eſt juſtice pour ſoy & pour les autres.
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