Page:La Bruyere - Caracteres ed 1696.djvu/174

Cette page n’a pas encore été corrigée

comme une borne au coin des places, il eſt vu de tous, & à toute heure, & en tous états, à table, au lit, nu, habillé, ſain ou malade : il ne peut eſtre important, & il ne le veut point eſtre.

13. — N’envions point à une ſorte de gens leurs grandes richeſſes ; ils les ont à titre onéreux, & qui ne nous accommoderoit point : ils ont mis leur repos, leur ſanté, leur honneur & leur conſcience pour les avoir ; cela eſt trop cher, & il n’y a rien à gagner à un tel marché.

14. — Les P. T. S. nous font ſentir toutes les paſſions l’une après l’autre : l’on commence par le mépris, à cauſe de leur obſcurité ; on les envie enſuite, on les hait, on les craint, on les eſtime quelquefois, & on les reſpecte ; l’on vit aſſez pour finir à leur égard par la compaſſion.

15. — Soſie de la livrée a paſſé par une petite recette à une ſous-ferme ; & par les concuſſions, la violence, & l’abus qu’il a foit de ſes pouvoirs, il s’eſt enfin, ſur les ruines de pluſieurs familles, élevé à quelque grade. Devenu noble par une charge, il ne luy manquoit que d’eſtre homme de bien : une place de marguillier a foit ce prodige.

16. — Arfure cheminoit ſeule & à pied vers le grand portique de Saint **, entendoit de loin le ſermon d’un carme ou d’un docteur qu’elle ne voyoit qu’obliquement, & dont elle perdoit bien des paroles. Sa vertu étoit obſcure, & ſa dévotion connue comme ſa perſonne. Son mari eſt entré dans le huitième denier : quelle monſtrueuſe fortune en moins de ſix années ! Elle n’arrive à l’égliſe que dans un char ; on luy porte une lourde queue ; l’orateur s’interrompt pendant qu’elle ſe place ; elle le voit de front,