Page:La Bruyere - Caracteres ed 1696.djvu/128

Cette page n’a pas encore été corrigée

parle à l’oreille dans un cabinet où elles ſont ſeules ; on a ſoy-meſme plus de deux oreilles pour l’écouter ; on ſe plaint à elle de tout autre que d’elle ; on luy dit toutes choſes, & on ne luy apprend rien : elle a la confiance de tous les deux. L’on voit Glycère en partie carrée au bal, au théatre dans les jardins publics, ſur le chemin de Venouze, où l’on mange les premiers fruits ; quelquefois ſeule en litière ſur la route du grand faubourg, où elle a un verger délicyeux, ou à la porte de Canidie, qui a de ſi beaux ſecrets, qui promet aux jeunes femmes de ſecondes noces, qui en dit le temps & les circonſtances. Elle paraît ordinairement avec une coiffure plate & négligée, en ſimple déſhabillé, ſans corps & avec des mules : elle eſt belle en cet équipage, & il ne luy manque que de la fraîcheur. On remarque néanmoins ſur elle une riche attache, qu’elle dérobe avec ſoyn aux yeux de ſon mari. Elle le flatte, elle le careſſe ; elle invente tous les jours pour luy de nouveaux noms ; elle n’a pas d’autre lit que celuy de ce cher époux & elle ne veut pas découcher. Le matin, elle ſe partagé entre ſa toilette & quelques billets qu’il faut écrire. Un affranchi vient luy parler en ſecret c’eſt Parménon, qui eſt favori, qu’elle ſoutient contre l’antipathie du maître & la jalouſie des domeſtiques. Qui à la vérité foit mieux connaître des intentions, & rapporte mieux une réponſe que Parménon ? qui parle moins de ce qu’il faut taire ? qui ſçait ouvrir une porte ſecrète avec moins de bruit ? qui conduit plus adroitement par le petit eſcalier ? qui foit mieux ſortir par où l’on eſt entré ?

74. — Je ne comprends pas comment un mari qui s’abandonne à ſon humeur & à ſa complexion, qui ne cache