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quelque choſe de plus vif & de plus fort que l’amour pour les hommes, je veux dire l’ambition & le jeu : de telles femmes rendent les hommes chaſtes ; elles n’ont de leur ſexe que les habits.

53. — Les femmes ſont extreſmes : elles ſont meilleures ou pires que les hommes.

54. — La plupart des femmes n’ont guère de principes ; elles ſe conduiſent par le cœur, & dépendent pour leurs mœurs de ceux qu’elles aiment.

55. — Les femmes vont plus loin en amour que la plupart des hommes ; mais les hommes l’emportent ſur elles en amitié. Les hommes ſont cauſe que les femmes ne s’aiment point.

56. — Il y a du péril à contrefaire. Liſe, déjà vieille, veut rendre une jeune femme ridicule, & elle-meſme devient difforme ; elle me foit peur. Elle uſe pour l’imiter de grimaces & de contorſions : la voilà auſſi laide qu’il faut pour embellir celle dont elle ſe moque.

57. — On veut à la ville que bien des idiots & des idiotes aient de l’eſprit ; on veut à la cour que bien des gens manquent d’eſprit qui en ont beaucoup ; & entre les perſonnes de ce dernier genre une belle femme ne ſe ſauve qu’à peine avec d’autres femmes.

58. — Un homme eſt plus fidèle au ſecret d’autrui qu’au ſien propre ; une femme au contraire garde mieux ſon ſecret que celuy d’autrui.

59. — Il n’y a point dans le cœur d’une jeune perſonne un ſi violent amour auquel l’intéreſt ou l’ambition n’ajoute quelque choſe.

60. — Il y a un temps où les filles les plus riches doivent prendre parti ; elles n’en laiſſent guère échapper les premières occaſions ſans ſe